Athéisme : l'homme debout. Vivre sans Dieu et sans religion  >  Vos contributions   > Evangélisation des Amérindiens > 3/5


L'évangélisation des Amérindiens du Canada par les Jésuites   -   3/5


Par Georges Timmermans  -  23 juin 2004




Les textes publiés dans Vos contributions (rouge foncé) ne représentent que l'opinion de leurs auteurs.




Premiers obstacles à l'évangélisation


Tout d'abord, les Hurons sont animistes, ils prient la terre, les rivières, les lacs, les rochers dangereux, la Tortue (qui est la créatrice du feu), la Grenouille (qui est à l'origine des mers, fleuves et lacs étant eux sortis de son aisselle), le Dieu Iskeha (qui est à l'origine de la vie sur terre, des moissons et de l'abondance) et que le narrateur confond, peut-être un peu vite avec Cérès/Démèter. C'est lui qui a aussi libéré les animaux d'une caverne pour qu'ils se dispersent sur la terre. Le Dieu Oki règle les saisons, tient en bride les vents et les flots de la mer. Les Indiens l'invoquent lors des serments et les traités de paix. Ils croient (comme les Celtes ou autres) que s'ils venaient à contrevenir à leur parole, ou à rompre cette alliance, le ciel les châtierait infailliblement : "Le ciel entend ce que nous faisons aujourd'hui".

Les songes sont "une croyance qui les surpassent toutes et règlent toute leur vie : chasse, pêche, guerre, actes importants. Ils sont souvent interprétés par un "spécialiste" classé parmi les "Sorciers", la bête noire des Missionnaires. "C'est leur Cassandre pour le malheur, l'Esculape et le Galien, c'est leur Mercure dans leurs voyages, les Oeconome dans leurs familles". Le jeûne était lui aussi souvent utilisé, soit pour favoriser des visions, soit pour atteindre un état de concentration de méditation sacrée. Ceci bien entendu échappe aux missionnaires, pour lui aussi le jeûne du Carême n'est que la commémoration des souffrances subies par le Christ.
Sur le plan des rites funéraires, le missionnaire est surpris d'observer des cérémonies complexes et fort bien réglées.

Etonnement aussi de constater la retenue et la sérénité "qu'ils gardent en leur sépulture et de leurs deuils", à la différence de beaucoup de chrétiens qui ne peuvent souffrir qu'on leur parle de la mort "et qui dans une maladie mortelle vous mettent en peine toute une maison pour trouver moyen de faire porter cette nouvelle au malade, sans le faire mourir par avance". L'Indien qui va mourir en est le plus souvent averti, il fait préparer ses vêtements, les objets qu'il emportera avec lui, son festin d'adieu avec ses amis, les détails de son ensevelissement, parfois, il prépare et chante une prière funèbre sans montrer aucune appréhension de la mort.

Comme on peut l'imaginer, l'obsession principale du missionnaire est l'âme, dans son acceptation chrétienne bien sûr ! Désireux de trouver la faille par laquelle il pourra s'introduire, il harcèle les Indiens de questions, mais toutes les explications qu'on lui donne, ne le satisfont pas : il confond les états d'âme avec les humeurs(selon que l'individu est raisonnable ou agressif, joyeux ou triste), l'esprit qui habite chaque partie du corps, celui qui l'anime et celui qui lui survit et reste dans le village pendant douze ans, jusqu'à la fête des morts où il quittera alors le cimetière et la maison des esprits pour s'envoler sous la forme d'une tourterelle qui sera abattue à coups de flèches, rôtie et mangée. Ensuite, l'esprit libéré part vers le soleil couchant vêtu de ses habits de fêtes, et s'installe dans un au-delà où chaque nation indienne a son village particulier. Les esprits des vieillards et des enfants restent dans leurs pays d'origine, étant plus faibles ils ne peuvent marcher plus loin.

Les esprits des guerriers tués au combat ainsi que ceux qui se sont défaits (suicidés), font bande à part.
Voici un des nombreux récits que les parents racontaient à leurs enfants.
Un frère décide de partir à la recherche de sa soeur défunte pour la ramener à la vie. En chemin il la rencontre et à chaque fois elle lui présente un plat de farine mélangée d'eau, tel un repas funéraire. Arrivé à la cabane sacrée, la Mort lui confie une courge dans laquelle se trouve la cervelle de sa soeur. Le chemin des esprits passe aussi près d'un rocher couvert des peintures que les Hurons (de leur vivant) s'appliquent sur le visage. Le passage d'un torrent sur un tronc d'arbre branlant est des plus périlleux, à peine engagé l'esprit du mort doit subir les assauts d'un chien qui tente de le précipiter dans l'eau, pour qu'il soit emporté par le courant. Il arrive enfin au village céleste où réside l'esprit de sa soeur. Elle le fuit, mais chaque nuit elle revient danser avec les autres esprits pour disparaître à l'aube. Le frère la guette et finit par s'en saisir et, après une longue lutte, il la réduit à une taille suffisante pour l'introduire dans une courge. Il entreprend le voyage du retour, et arrivé à la cabane des esprits, la Mort lui indique les conditions pour ramener sa soeur au monde des vivants : "tu déterreras le cadavre de ta soeur, puis organiseras un grand festin, où tu convieras le village. A la fin du festin, à l'aube, ta soeur rejoindra le monde des vivants, à une condition que pendant toute la cérémonie nul ne lève les yeux".
Bien entendu, comme dans le mythe grec d'Orphée et d'Eurydice, la curiosité l'emporte et l'esprit regagne définitivement le village des morts.

Mais le Jésuite n'est pas touché par cette légende pourtant fort bien structurée et au symbolisme fort intéressant, il s'exclame simplement : "Vray Dieu que d'ignorance et de stupidité" ! A croire qu'il n'a jamais lu les auteurs antiques (Virgile et l'Enéide par exemple) ou leurs continuateurs comme Dante !
Le passage de l'eau, le pont périlleux, le rôle du chien Cerbère gardien des Enfers, le retour vers le monde des vivants de l'être aimé n'est possible que si l'on manifeste le plus grand respect envers le mystère (défense de se retourner, interdiction de regarder), tout cela n'évoque rien en son âme sclérosée par une éducation qui le lie et l'aveugle.


Suite   >>>   Festins, jeux de plat et de crosse


Athéisme : l'homme debout. Vivre sans Dieu et sans religion   Vos contributions    Haut de page    Contactcontact   Copyright ©