"Bref, il faut du courage pour aimer ce Dieu qui ne se montre jamais; ce que la mythologie exprime naïvement par les deux puissances balancées du bien et du mal. Et ces difficultés mettent aux désespoirs les préfets de religion, qui prétendent savoir ce qui en est et enseigner ce qui en est. Mais au contraire, ces subtilités mythologiques expriment très bien la pensée de l'homme et les replis de la morale. Le saint est l'homme qui se passe de Dieu."
(Emile Chartier, dit Alain / 1868-1951 / Propos sur la religion, Dieu incertain, 1er août 1932)
"On ne pouvait donc jamais échapper au cléricalisme, qui était cette fois celui des laïques [catholiques]. Cléricalisme de toujours, dont je découvrais la ligne de conduite:
Il n'y a qu'une seule vérité, et c'est la nôtre. Si tu ne la partages pas totalement, une seule alternative: ou tu es un peu sot, et nous allons t'éclairer, pour ton bien. Ou alors tu refuses d'adhérer et cette ligne de pensée, et tu deviens notre ennemi: nous allons t'écraser, pour ton bien."
(Michel Benoît / Prisonnier de Dieu, 1992)
"Mais, sans nous en apercevoir, nous projetons nos désirs (nos appétits) dans les choses : nos idées du bien et du mal sont l'expression de nos désirs (et de nos répulsions), de notre imagination, et non le résultat d'une connaissance. Le raciste et le nationaliste xénophobe, le moralisateur des ligues de vertu ou le "macho" prennent pour des idées ce qui n'est que fantasme : "l'immigré-délinquant-par-nature", le "pêcheur-débauché", la "putain" ou la "femme-inférieure-soumise" sont, à leur insu, comme le diront plus tard Nietzsche et Freud, des traductions et des travestissements des désirs, des "fantasmes", des manifestations de l'inconscient, des travestissements ou symptômes des instincts du faible et des mécanismes de défense du névrosé."
(Eric Blondel / La morale)
"Ne croyez pas sur la foi des traditions alors même qu'elles sont en l'honneur depuis de longues générations et en beaucoup d'endroits. Ne croyez pas une chose parce que beaucoup en parlent. Ne croyez pas sur la foi des sages des temps passés. Ne croyez pas ce que vous vous êtes imaginé, pensant qu'un Dieu vous l'a inspiré. Ne croyez rien sur la seule autorité de vos maîtres ou des prêtres. Après examen, croyez ce que vous aurez expérimenté vous-même et reconnu raisonnable. Ce qui est conforme à votre bien et à celui des autres."
(Bouddha / Kâmâla sutra / Traduction : Alexandra David-Neel, Le bouddhisme du Bouddha)
"Le sceptique est le désespoir du diable. C'est que le sceptique, n'étant l'allié de personne, ne pourra aider ni au bien ni surtout au mal. Il ne coopère avec rien, même pas avec soi."
(Émile Michel Cioran / 1911-1995 / Cahiers 1957-1972)
"Au sens philosophique, le matérialisme est d'abord une ontologie - une théorie de l'être - ou une conception du monde. C'est la doctrine qui affirme qu'il n'y a d'être(s) que matériel(s) : le matérialisme est un monisme physique. A ce titre, il se définit surtout par ce qu'il exclut : être matérialiste, c'est penser qu'il n'existe ni monde intelligible, ni dieu transcendant, ni âme immatérielle. Ce n'est pas pour autant renoncer aux valeurs ou aux biens spirituels."
(André Comte-Sponville / né en 1952 / Comment peut-on être matérialiste ? Comment peut-on être humaniste ? / 1998)
"La laïcité, c'est la disponibilité universelle du patrimoine humain, c'est la loi qui veut que chaque homme soit maître de son bien et que son bien se trouve partout où il y a des hommes."
(Robert Escarpit / 1918-2000 / Ecole laïque, école du peuple / 1961)
"Chaque jour vous dites sans scrupule : "faites le bien, évitez le mal, aimez Dieu, nous avons une âme immortelle", sans savoir ce que c'est que le bien et le mal, sans jamais avoir vu Dieu, sans savoir s'il existe, et vous en rapportant à la foi d'un vieux prêtre radoteur qui, comme vous, n'en savait rien ; pour l'âme, vous en êtes sûr, convaincu, persuadé, vous donneriez votre sang pour elle, et qui vous l'a démontrée ?"
(Gustave Flaubert / 1821-1880 / Smarh /1839)
"Je crois à l'amour, je crois à la beauté, je crois à la justice, je crois malgré tout que dans cette terre le bien l'emporte sur le mal et que les hommes créeront Dieu."
(Anatole France / 1844-1924 / Le roman de Dieu)
"La religion a fait de grands maux, et peu de petits biens."
(Claude Adrien Helvétius / 1715-1771 / Pensées et réflexions)
"J'ai montré ailleurs que la raison, en Métaphysique, ne peut réaliser comme elle le désirerait tous ses desseins en suivant la voie théorique de la nature (en ce qui concerne la connaissance de Dieu), et que par conséquent il ne lui reste plus que la voie téléologique ; entendons néanmoins par là que ce ne sont pas les fins de la nature, fondées uniquement sur des preuves tirées de l'expérience, mais une fin déterminée a priori par la raison pure pratique (dans l'Idée du Bien suprême), qui doit suppléer au défaut et aux insuffisances de la théorie."
(Emmanuel Kant / 1724-1804 / De l'usage des principes téléologiques en philosophie / 1788)
"La méditation consiste à être conscient de chaque pensée, de chaque sentiment; à ne jamais les juger en bien ou en mal, mais à les observer et à se mouvoir avec eux. En cet état d'observation, on commence à comprendre tout le mouvement du penser et du sentir. De cette lucidité naît le silence."
(Jiddu Krishnamurti / 1895-1986 / Se libérer du connu / 1977)
"Concevoir le diable comme un partisan du Mal et l'ange comme un combattant du Bien, c'est accepter la démagogie des anges."
(Milan Kundera / né en 1929)