Athéisme : l'homme debout. Vivre sans Dieu et sans religion  >  Vos contributions    > Pazuzu's Advocate


Pazuzu's Advocate


par Eric Timmermans  -  14/09/2009




Les textes publiés dans Vos contributions (rouge foncé) ne représentent que l'opinion de leurs auteurs.




1. Dans les ténèbres des salles obscures.

Etes-vous amateur de films d'épouvante ? Moi je l'ai toujours été. Le titre de ce texte s'inspire d'ailleurs d'un film -Devil's advocate- dont l'un des rôles principaux est interprété par Keanu Reeves mais qui, en définitive, tient essentiellement, selon moi, par la personnalité de l'autre acteur de premier plan : Al Pacino. Celui-ci, sous les traits d'un chef de cabinet d'avocats de renommée internationale, campe le rôle du Diable dont Keanu Reeves est, en non connaissance de cause, l'associé et le disciple et, accessoirement, le rejeton. Certains discours du Diable-Al Pacino constituent, disons-le, un délice dont l'esprit libre ne se lasse guère. Il m'est dès lors d'autant plus aisé de me faire l'avocat du Diable, en jouant sur les mots, entre français et anglais (1).

Le bon film d'épouvante, celui qui, notamment, dépasse le stade du "gore" pur, véhicule généralement des messages sociaux ou psychologiques d'un intérêt variable. L'absence, la faiblesse ou l'incompétence du père, de même que les troubles de l'enfance et de l'adolescence y sont bien souvent dépeints (Ca, Sixième sens, Poltergeist, L'Exorciste, Psychose, Dragon Rouge, Dark Water) et renvoient à des réalités sociales bien actuelles. Le protecteur de la famille supposé mis, d'une manière ou d'une autre, "sur la touche", la femme se voit contrainte de lutter seule contre les "forces du Mal", pour se défendre et défendre sa progéniture. A moins que, tout au contraire, sa propre maltraitance exercée sur autrui n'ait fait naître un "détraqué", un "monstre", le fameux et si prisé "serial killer" (Psychose, Dragon Rouge).

Mais il existe des messages plus subtils et que d'aucuns jugeront peut-être moralement malsains, tels que ceux véhiculés, par exemple, par la saga d'Hannibal Lecter. Comment, en effet, résister au charme sulfureux de ce sublime raffinement, de cette incomparable intelligence, de cette délicatesse d'esthète émanant, irradiant littéralement, du personnage de notre docteur cannibale interprété par l'incomparable Anthony Hopkins ? On en viendrait même à s'interroger sur le caractère criminel de ses actes. Il tue et sert à ses invités un musicien cuit à point, certes, mais Diable, celui-ci était médiocre; il assassine un inspecteur florentin, il est vrai, mais celui-ci avait lui-même un crime sur la conscience et comment ce minable flic aux allures de Colombo défraîchi pouvait-il avoir épousé la si charmante jeune femme qui était la sienne, une entorse au bon goût, ceci soit dit sans jeu de mot douteux; il déguste le directeur de son asile psychiatrique, le Dr Chilton, c'est un fait, mais c'était là un être odieux et vain; il défigure et handicape le richissime Mason Verger avant de le jeter en pâture aux sangliers, nous ne le nions point, mais ce n'était là qu'un ignoble pédophile; il découpe et cuit un morceau du cerveau d'un avocat vulgaire et arriviste, mais en quoi ce cerveau lui était-il utile, de toute façon, je vous le demande ? Et en définitive, notre docteur préfère, pour se libérer, se couper le bras plutôt que de sacrifier celui de la belle Starling.

Voilà bien la preuve, pardi, qu'Hannibal Lecter n'est pas si mauvais que ça ! On peut même dire qu'il incarne à lui seul la juste révolte de tous les esthètes, cultivés, littéraires, artistes, gastronomes, confrontés chaque jour à notre monde abject de consommation vulgaire et de médiocre ambition sociale. L'avocat arriviste s'était montré grossièrement misogyne à l'égard de l'agent Starling et il poussa l'outrecuidance jusqu'à confondre le raffinement du Dr H. avec de l'homosexualité. Quoi de plus naturel, dès lors, que de lui couper, sur le vif, un morceau du cerveau et de le lui servir après cuisson ?

C'est à ce stade de vos réflexions que doit, assez logiquement, se manifester une petite voix intérieure ironique stigmatisant votre incommensurable vanité de frustré social mégalomane, ce que nous sommes tous plus ou moins. Non, le Dr. Lecter n'est pas un être sympathique et le personnage exclusivement fictif -heureusement !- que le cinéma nous offre a beau nous donner éventuellement l'impression de nous venger et de nous laver d'une certaine fange de médiocrité sociale contemporaine, il n'en n'incarne pas moins une belle ordure, celle qui, certes à des degrés divers, sommeille en chacun de nous. Et c'est donc en connaissance de cause, je pense, que j'aime à voir et à revoir, avec un plaisir sans cesse renouvelé, les aventures du Docteur Hannibal Lecter, et tout particulièrement "Hannibal", qui le met si bien en valeur.

C'est là une approche moniste, non dualiste qui, en règle générale, échappe à l'entendement du croyant moraliste et moralisateur. Dans le chef de ce dernier, ce qu'il nomme l' "horreur" doit être rejetée et enfouie au plus vite, au plus profond de l'être prétendument fait à l'image du "Dieu de Bonté" et "Sommet" de sa plus qu'hypothétique "Création". Qu'une "petite voix" telle que je l'évoque, puisse se manifester dans un coeur d'athée et, de surcroît, d'athée ouvertement déclaré amoraliste, c'est-à-dire n'adhérant à aucune morale sociale établie, est quelque chose d'inconcevable pour le croyant qui ne peut, en définitive, l'expliquer que par une intervention surnaturelle, "divine", que l'esprit libre a, dans son "immense ignorance", omis de comprendre ou de vouloir comprendre.

La réalité, toutefois, est autre. L'esprit libre est capable de se passer de béquilles surnaturalistes pour déterminer ce qu'il doit ou ne doit pas faire. Il assume son identité de singe nu carnivore et expansionniste sans pour autant, sans forcément, passer à l'acte criminel et tout en pouvant, sans trouble excessif, examiner voire contempler la part de "ténèbres" qu'il porte naturellement en lui à l'instar de chaque être humain. Pas besoin, pour l'athée, pour l'esprit libre, de menaces de flammes infernales ou de promesses paradisiaques pour pouvoir se contenir et respecter autrui. Sans être un saint ni un salaud, l'athée sait, au plus profond de lui, qu'il ne vaut tout simplement pas le moindre cierge... (2) A l'inverse du croyant, l'esprit libre, l'"être différencié", n'éprouve guère le besoin d'échapper à la réalité du monde en cherchant refuge dans le secours de la foi. Non seulement l'esprit libre ne croit pas, mais il ne veut pas croire : "On ne peut pas être chrétien ni musulman quand on ne croit pas en Dieu; et c'est son cas. L'homme différencié n'est pas seulement un homme qui ne peut pas croire, c'est aussi un homme qui ne veut pas croire." (3)

Ayant lâché le bord de la piscine de toutes les certitudes (du moins le devrait-il) et s'étant débarrassé des petites bouées de secours spirituel que lui proposent habituellement les églises, l'esprit libre peut ainsi s'engager hardiment et volontairement, paré de cette incomparable qualité qu'est l'orgueil, dans l'océan de l'incertain, source de cette connaissance tant honnie par les partisans de la superstition, de la crédulité et de la soumission.

Est-ce à dire que le domaine des ténèbres et de l'épouvante constituerait le domaine exclusif de l'athée ? Bien au contraire, si l'athée peut contempler l'épouvante sans pour autant exagérément s'y complaire, le croyant prosélyte, lui, a souvent pour coutume de quitter ses chères et aveuglantes lumières pour utiliser l'obscur comme instrument de propagande et de culpabilisation. Ainsi en est-il, notamment, du film l'"Exorciste" (1973) de William Friedkin, véritable ode à l'Eglise catholique et à ses plus profondes superstitions, ce qui ne m'empêche guère de l'apprécier au moins autant que la saga d'Hannibal Lecter.


2. L'Exorciste ou Pazuzu revisité

Le père Merrin (Max von Sydow) découvre un jour dans la terre biblique d'Irak, une étrange tête sculptée qui n'est autre que celle du démon mésopotamien Pazuzu (ou "le pazuzu"). En signe de défi, Merrin se rend sur un autre site archéologique et fait face à la statue complète du monstre démoniaque; la confrontation manichéenne entre le "bien" et le "mal" peut à présent commencer. Le spectateur ne possédant pas un minimum de culture antique mésopotamienne ne peut pourtant savoir, à ce moment, qu'il est en présence d'une divinité avérée de la mythologie mésopotamienne. Pazuzu n'est pas une invention hollywoodienne.

Pazuzu apparaît sous l'aspect d'un être décharné, aux côtes saillantes. Il est doté de deux paires d'ailes, de mains griffues et ses jambes se terminent en serres d'aigle. Son visage est grimaçant et il est doté d'une queue de scorpion. Son apparence est en grande partie à l'origine de certaines représentations occidentales du Diable. En effet, "on retrouve chez les Sumériens, les plus anciennes expressions de démonologie et d'angélologie. Ces notions vont influencer les Assiro-Babyloniens puis le monde hébraïque jusqu'au christianisme." (4)

Plusieurs représentations de Pazuzu nous sont connues. L'une d'elles est une statuette de bronze conservée à Paris, au musée du Louvre, et datant du 7ème siècle avant l'ère chrétienne. Ce petit bronze représente Pazuzu vu de face, le corps entouré de ses quatre ailes déployées ; "la tête est surmontée d'un appendice plat, dont le trou est oxydé par le vert-de-gris, qui servait à suspendre la statuette" (5) De fait, l'image de Pazuzu était utilisée comme amulette protectrice, nous verrons pourquoi ultérieurement. Une autre figurine de Pazuzu est également conservée à Paris, au musée Guimet. Bien qu'elle le représente accroupi, son aspect général est semblable à celui de la statuette du Louvre. Ses ailes sont diminuées pour donner moins de prise aux chocs, sa queue de scorpion est ramenée sur le dos et son corps est couvert d'imbrications simulant les écailles. Il existe également des têtes sculptées de Pazuzu conservées au British Museum.

Particulièrement craint jadis en Mésopotamie, Pazuzu, véritable démon de la dévastation, est, selon cette mythologie, le fils du roi des mauvais esprits, un nommé Hanpa (ou Hampa, Hanbu, Hanbi) : "Moi, je suis Pazuzu, fils de Hanpa roi des mauvais esprits de l'air, qui sort des montagnes, violemment, en faisant rage." (5) C'est là la titulature reproduite sur le dos de la statuette et supposée donner son efficacité à la conjuration.

Dans la mythologie mésopotamienne, Pazuzu est aussi assimilé au vent du Sud-ouest et propage sur son passage les maladies et particulièrement la malaria. Cet aspect de sa personnalité est largement développé dans "L'Hérétique" (1977), le second volet de l' "Exorciste". Au moustique, qui eut été plus approprié pour un propagateur de malaria, l'on préféra la bien plus biblique sauterelle (vraisemblablement un criquet pèlerin), sous l'aspect de laquelle Pazuzu se manifeste dans le film. La religion, il est vrai, ne s'embarrasse guère de science entomologique.

Mais, nous conte William Friedkin, voilà qu'un jour apparaissent ici et là des êtres exceptionnels capables de guérir leurs semblables. Dans l'Exorciste II (L'Hérétique), l'on nous explique d'ailleurs doctement que ces êtres d'exception sont semblables à de "gentilles sauterelles" capables de rendre bénéfiques les "méchantes sauterelles", des fois que nous, les nuques raides et orgueilleuses de l'insoumission n'aurions pas encore compris qu'il y a l' "absolu bien" d'un côté et l' "absolu mal" de l'autre. On devine aisément la main du "bon dieu" du Nouveau Testament dans cette histoire et l'on en déduit que l'apparition de ces perturbateurs venus endiguer la propagation des maladies ne sera guère du goût de Satan. De fait, celui-ci, furax, envoie dans notre monde Pazuzu, dont nous avons vu la relation avec la maladie. Pazuzu s'applique donc à posséder, au sens démoniaque et catholique du terme, les "gentilles sauterelles" pour les pervertir et les détruire.

Parmi les innocentes victimes du démon on compte une jeune fille hispanique, un jeune homme africain nommé Kokumo, qui vit dans un genre de village africain mythique situé quelque part entre l'Ethiopie et l'Afrique occidentale francophone, et, notre héroïne, la jeune Regan (Linda Blair), fille d'une actrice vaguement progressiste (mais surtout irréligieuse) et d'un père absent (et vraisemblablement indifférent). Un clair message nous est transmis : si mal défendue par des parents aussi ineptes, de même que par une pléthore de scientifiques totalement dépassés par les événements, absence de foi chrétienne oblige, la jeune Regan se trouve bientôt possédée par Pazuzu. C'est le début de l'horreur.

Dans le premier volet de la saga "Exorciste", ladite Regan ne devra finalement son salut -au sens proprement chrétien du terme- qu'à l'intervention du père Merrin, que nous avons déjà présenté, et du père Karras. Celui-ci, poussé par les jésuites, a fait des études psy, préfère semble-t-il le Chivas au vin de messe, a été incapable d'empêcher que sa vieille mère ne meurt à l'hosto et, last but not least, a de toute évidence perdu la foi. Le dieu de bonté et de miséricorde va donc lui faire croiser le chemin de la mère désespérée de Regan et l'envoyer combattre Pazuzu au côté du père exorciste Merrin. Les deux curés laisseront la vie dans l'aventure, certes, mais après une multitude de salamalèques délirantes, dignes de Barnum et nommées "exorcisme" (6), ils finiront par sauver Regan des griffes de l'Immonde. L'épreuve passée, celle-ci ne se souviendra de rien mais se jettera au cou (au sens premier, innocent et enfantin du terme, CQFD) du premier curé venu, à la seule vue de son col romain. Le clair message est donc à nouveau délivré : point de salut hors de l'Eglise catholique apostolique et romaine.

Dans le second volet de l'"Exorciste", réalisé cette fois par John Boorman, la jeune Regan (toujours Linda Blair), qui a à présent seize ans et s'est donc ici et là arrondie, est à nouveau aux prises avec Pazuzu. Elle est tiraillée entre sa psy et un curé (un autre jésuite) interprété par Richard Burton. Le film, qui nous dévoile la personnalité de Pazuzu, voit Regan sortir victorieuse de l'épreuve démoniaque avec l'aide du père Lamont (Richard Burton) qui, après la victoire sur le démon, sera chargé de veiller sur elle, sait-on jamais...mais gare à la tentation de la chair, "mon p'tit père". Quant à la psy, témoin des ultimes péripéties démonologiques et enfin sortie de ses "ténèbres rationalistes", elle conclura la saga exorciste (7) par ces quelques mots sentant à plein nez le come back christique : "Regan, je suis désolée… Je comprends maintenant. Le monde ne comprendra pas. Pas encore". Autrement dit, avant d'accéder à la suprême science de la superstition religieuse, l'humanité devra encore faire preuve de patience car elle devra bien compter avec nous autres, êtres dénués de foi et donc d'intelligence (dixit les Ecritures dites "saintes"), qui sommes loin d'être prêts, nous le concédons, à avaler d'aussi grosses couleuvres carnavalesques et cela même si d'excellents croyants, représentants de cette Amérique chrétienne qui est aujourd'hui la première puissance mondiale, nous montrèrent pourtant clairement, par leurs actes posés, la voie de l'intelligence véritable, celle qui est leur, à la sortie du film l'Exorciste, en 1973 :

"Aux Etats-Unis, l'Exorciste de William Friedkin connut un rare succès en 1973. Des scènes d'hystérie parmi les spectateurs de Boston et de la côte Est furent rapportées par les journaux. La représentation d'un rituel catholique d'exorcisme sur le corps d'une possédée fit forte impression sur les puritains, alors que nombre d'Européens se sentirent plutôt déçus lorsqu'ils allèrent voir cette production précédée d'une réputation sulfureuse. En 1975, 30 millions d'entrées avaient été enregistrées aux Etats-Unis, ce qui donne une idée de l'influence sociologique du sujet." (8)

En outre, et c'est cela qui nous importe ici, afin d'accréditer la thèse dualiste et manichéenne de la lutte du "bien" contre le "mal", les deux films mentent par omission. Propagande oblige, l'on a voulu retenir de Pazuzu que son aspect négatif, bien réel, certes, mythologiquement parlant, mais non absolu.

Nous l'avons vu, les Mésopotamiens portaient l'effigie de Pazuzu en amulette, or, on peut le dire, il est assez rare que l'on porte un talisman pour attirer sur sa personne le déferlement de toutes les maladies possibles ! Le fait est que si Pazuzu était bien considéré comme une entité terrible, un propagateur de maladies, son effigie avait également, dans l'optique moniste qui était vraisemblablement celle des Mésopotamiens, une valeur protectrice. C'est donc pour éloigner les maladies que l'on utilisait l'image de Pazuzu.

Nous voilà donc hors de la pensée dualiste ou partiellement dualiste qui conçoit ce qui nous est fâcheux à nous, humains, comme étant le "Mal", et que ce qui nous est bénéfique, constitue le "Bien". Les notions de "divinité terrible" et de "dieu du Mal" sont des notions que les dualistes confondent erronément. Dans la logique moniste, un être démoniaque, terrible, peut revêtir des aspects bénéfiques, et inversement un être divin, lumineux, bénéfique, peut également revêtir des aspects terribles. Cette approche nous permet de nous libérer d'une pensée manichéenne et binaire quelque peu puérile, incluant l'idée d'un dieu "absolument bon" opposé à une entité représentant le "mal absolu" que le premier, soulignons-le, est, en outre, en toute logique monothéiste, supposé avoir créé... !

Le rôle protecteur de Pazuzu est encore souligné par son opposition à Lamashtu, une autre entité démoniaque : "Figure plus récente, attestée à partir du Ier millénaire, le démon Pazuzu est le chef de la gent démoniaque, grand propagateur des épidémies et "roi des mauvais esprits de l'air". Paradoxalement, l'autorité dont il dispose sur les forces du mal lui donne aussi le pouvoir de les neutraliser. Il est alors invoqué pour conjurer les maléfices de ses congénères, en particulier ceux de Lamashtu, dont il devient presque l'indissociable revers de la médaille." (9)

Lamasthu a notamment la réputation de frapper de fièvres particulièrement virulentes les femmes en pleine grossesse, au point que cela les oblige à avorter. Ce trait de sa personnalité la rapproche de la Mésopotamienne Lilith et de la Lamia hellénique.

Ainsi Pazuzu apparaît-il au revers d'une plaque de conjuration contre Lamashtu, absurdement nommée "plaque des Enfers" et conservée au Musée du Louvre :

-"La démone montée sur son âne brandit des serpents et allaite des lionceaux. La tête dépassant du revers est celle du chef des démons Pazuzu invoqué en faveur du malade (alité au centre, entre des prêtres exorcistes), de même que les grands dieux dont les attributs sont figurés au registre supérieur. Au bout d'une barque, la démone reprend le chemin des eaux souterraines de l'Apsû, signe de la guérison espérée du malade." (10)

-"Au revers de la plaque (pl. VIII, b), on voit, de dos, un monstre ailé; les ailes sont simplement gravées tandis que le corps est en relief. C'est un corps de fauve, recouvert d'écailles; la queue et le pénis de l'animal se terminent en tête de serpent; les pattes postérieures sont celles d'un aigle; les pattes de devant, qui s'agrippent au sommet de la plaque se terminent en griffes, et la tête qui surmonte la plaque ressemble à celle d'un lion. Il s'agit du pazuzu, le démon qui personnifie, comme nous l'avons dit (p. 99) le vent du Sud-Ouest générateur de fièvres." (11)

On le voit, à l'instar du Dr. Hannibal Lecter, le démon Pazuzu n'est pas celui que l'on croit. Mais les voies magiques de la crédulité sont innombrables : croire plutôt que savoir, voilà bien tout le problème : "L'antique invite de la Genèse à ne pas vouloir savoir, à se contenter de croire et d'obéir, à préférer la Foi à la Connaissance, à récuser le goût de la science et à souligner la passion pour la soumission et l'obéissance ne contribue pas à rehausser le débat; l'étymologie de musulman qui signifie, dixit Littré, soumis à Dieu et à Mahomet; l'impossibilité de penser et d'agir dans le moindre détail du quotidien en dehors des prescriptions millimétriques de la Torah; tout cela dissuade de préférer la Raison à la soumission... Comme si la religion avait besoin d'innocence, d'inculture et d'ignorance pour proliférer et exister plus sûrement !" (12)


Eric Timmermans

Bruxelles, le 14 septembre 2009.


Voir la page d'accueil sur le diable



Notes :
  • (1) "Devil's advocate" est erronément traduit, en français, par "Avocat du Diable", qualificatif plus parlant, pour nous, francophones, alors qu'il faut en réalité lire "Associé du Diable".

  • (2) "A porter ma vie sur mon dos / J'ai déjà mis cinquante berges / Sans être un saint ni un salaud / Je ne vaux pas le moindre cierge / Marie, maman, voilà ton fils / Qu'on crucifie sur des affiches / Un doigt de scotch et un gin-fizz / Et tout le reste je m'en fiche ! / Ils ont voté et puis après ?" (Ils ont voté et puis après, chanson de Léo Ferré, 1969).

  • (3) Chevaucher le tigre, Julius Evola, Guy Trédaniel Editeur, 2002, Introduction, p. XLI.

  • (4) L'Ange déchu, M. Centini, Editions de Vecchi, 2004, p. 22.

  • (5) La Magie chez les Assyriens et les Babyloniens, Dr. G.. Contenau, Payot, 1947, p. 99.

  • (6) Cette réflexion renvoie à mon texte consacré au renouveau exorciste dans l'Eglise catholique, mis en ligne par atheisme.free le 11 avril 2005, et intitulé "Actualité de l'exorcisme et de la possession diabolique dans l'effort de prosélytisme catholique".

  • (7) Je ne connais, pour ma part, que les deux premiers volets de la saga de "L'Exorciste". L'aventure de Pazuzu continue toutefois dans "L'Exorciste III" (1990 ; Karras, pourtant décédé dans le premier volet, est possédé par le démon) et "L'Exorciste au commencement" (2004 ; une certaine Sarah est possédée par Pazuzu). Mais il ne faut point, on le sait, abuser des bonnes choses...

  • (8) Une Histoire du Diable, Robert Muchembled, Seuil, 2000, p. 337.

  • (9) L'invention du Diable, Le monde de la Bible n°179, Septembre-Octobre 2007, p. 20-21.

  • (10) Ibid., p. 19.

  • (11) La Magie chez les Assyriens et les Babyloniens, Dr. G. Contenau, Payot, 1947, p. 228. (12) Traité d'athéologie, Michel Onfray, Grasset et Fasquelle, 2005, p. 81.


Sources :
  • Chevaucher le tigre, Julius Evola, Guy Trédaniel Editeur, 2002.

  • Dictionnaire du Diable, Roland Villeneuve, Omnibus, 1998.

  • La Magie chez les Assyriens et les Babyloniens, Dr. G. Contenau, Payot, 1947.

  • L'Ange déchu, M. Centini, Editions de Vecchi, 2004.

  • L'Invention du Diable, Le monde de la Bible n°179, Septembre-Octobre 2007.

  • Le Prince de ce monde, Nahema-Nephtys et Anubis, Editions Savoir pour Etre, 1993.

  • Traité d'athéologie, Michel Onfray, Grasset et Fasquelle, 2005.


Athéisme : l'homme debout. Vivre sans Dieu et sans religion   Vos contributions    Haut de page    Contactcontact   Copyright ©