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Evolution

Les contradictions d'un Dieu parfait, tout-puissant, créateur etc.


par H.-P. Gottlos  -  24/03/2019




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Il est assez amusant de rechercher et si possible de débusquer dans le dogme chrétien ou même, d'une manière générale, dans la croyance en un Dieu parfait, tout-puissant, créateur et "gestionnaire" de sa création, les contradictions qui en fait... le condamnent.

Une personne très pieuse, très croyante et assez militante de mon entourage m'écrit : "...la pensée créatrice divine est à l'origine de la première matière à la base de l'évolution du monde."
Affirmation conciliante en apparence tout en restant péremptoire et sans réplique... pour sauver l'essentiel malgré tout : un dieu créateur.

D'abord, je doute que le croyant soit en mesure de nous faire comprendre ce que devrait être "une pensée créatrice" en dehors d'une métaphore et surtout, en dehors d'un cerveau humain à peu près normalement constitué ; comment en somme un pur esprit, ce que Dieu est censé être, produit de l'énergie, puisque la matière, c'est une forme de l'énergie [1].
Mais soit, admettons !

Si je lis bien, et contrairement à la tradition biblique fixiste, toujours en cours par ailleurs, le croyant moderne admet donc la théorie de l'évolution. A défaut de plus de précision, nous admettrons donc qu'y est incluse l'évolution du vivant qui se développe à partir de la matière inerte.

Les catholiques seraient-ils devenus des darwiniens convaincus ? [2] Tant mieux... Voilà qui nous place sur un terrain commun.

La doctrine actuelle serait donc celle-ci : Dieu crée à partir de rien, ex nihilo, par la seule force de sa pensée créatrice, la première matière originelle, ce que d'aucuns appellent "la soupe primordiale", sans doute le tohu-bohu de la Genèse, et laisse à l'évolution le soin d'une mise en ordre progressive de ce chaos avec l'initiative des vastes développements ultérieurs aboutissant au monde infiniment complexe, ordré et structuré que nous connaissons.

D'où provient cette évolution, quelle force la met en mouvement, cela n'est pas dit. Pour ma part je n'en aperçois qu'une seule disponible dans cette théorie : la puissante énergie de la "pensée divine" dont sont issues directement les boules (les atomes ?) par sa seule force (de pensée !), que Dieu jette maintenant comme cela, au hasard, à travers l'univers où elles iront ainsi rouler leur bonhomme de chemin à travers l'espace et au long de milliers de millions de millénaires pour former un monde finalement ordré, celui dont vous et moi faisons partie et que nous habitons... provisoirement. Mais tortueux, le chemin, incroyablement, infiniment tortueux. Et d'une inimaginable, inextricable complexité.

Fort bien ! Il faut donc juste croire à l'impulsion première chère à ceux qui ne peuvent plus rejeter l'évolution, scientifiquement établie, prouvée et désormais incontestable pour tout être normalement conformé mentalement (théorie pourtant haineusement raillée par les religions et vouée aux Gémonies en ses débuts - et aujourd'hui encore par certains - comme impie et blasphématoire...)

Mais cette idée d'un Dieu qui, s'étant contenté de créer la matière première d'un univers en désordre en confie le devenir à l'évolution qui, soumise à des lois générales, y met de plus en plus d'ordre et l'amène à une telle complexité que finit par émerger quelque part en son sommet la matière consciente, l'homme, la propre image de ce Dieu, cette idée aboutit en vérité, si on y regarde d'un peu plus près, à démontrer l'exact inverse de ce qu'elle voudrait préserver : la pensée créatrice de Dieu. Car de deux choses l'une, nous le verrons : soit Dieu a tout créé, ne laissant rien au hasard et en ce cas il n'y aurait pas d'évolution à proprement parler mais seulement des plans de construction ; soit il ne crée rien et c'est elle, l'évolution, qui crée tout à sa fantaisie, si l'on peut dire puisqu'alors c'est le règne de l'aléatoire et de l'imprédictible. En réalité, cette idée d'évolution devrait être assez encombrante pour qui veut à la fois l'admettre pour être en harmonie avec la science et sauver Dieu.

En effet :

Hypothèse 1 - Dieu a tout créé dans le moindre détail, a tout pensé, voulu, arrêté, planifié : alors il n'y a pas d'évolution : chaque état du monde, chaque forme de vie est créée individuellement et voulue par Dieu. Là au moins, les théories fixistes sont conséquentes, qui rejettent toute idée d'évolution et n'admettent que le vaste plan de Dieu élaboré de toute éternité. Le malheur pour elles, c'est qu'elles sont alors incapables d'expliquer les formes ayant existé il y a des milliers et des millions d'années et subsisté pendant des ères géologiques entières pour finalement s'éteindre et disparaître à jamais de la surface de la Terre : Dieu aurait-il créé inutilement ? De plus il aurait beaucoup hésité et se serait souvent ravisé, se serait même carrément contredit : en effet, l'on sait que certaines formes actuelles du vivant ressemblent et sont proches, voire très proches, mais différentes cependant, de formes anciennes qui n'existent plus. A commencer par nos multiples cousins de la lignée humaine, plus ou moins proches, tel l'homme de Neandertal dont on sait qu'avec sa capacité crânienne légèrement plus importante que la nôtre il était aussi intelligent que nous Homo sapiens, qu'il fabriquait de vrais outils, qu'il s'occupait de ses morts, qu'il avait sûrement déjà le langage mais en revanche dont nous ignorons s'il a péché lui aussi au Paradis terrestre et a nécessité d'être sauvé par le fils de Dieu...

Le fixisme en tout cas est, lui, incapable d'expliquer les fossiles et les espèces disparues. Quoi qu'il en soit et quand, dans le seul domaine du vivant par exemple, on considère tous les ratés de cette création, les culs-de-sac et les voies sans issue où elle a abouti - les milliers d'espèces apparues puis disparues au cours des âges -, on a du mal à croire en un être prétendument parfait qui crée mais ne cesse de se reprendre et de se dédire. Création d'ailleurs jamais achevée puisque dans son mouvement éternel, aussi imperceptiblement que ce soit en général, l'univers change à chaque instant, même à cette minute où j'écris ces lignes.

Hypothèse 2 - Dieu ne crée que la "première matière" que l'évolution se charge d'organiser ultérieurement. A elle, en fait, de créer le monde. Alors le croyant prête à Dieu ce que l'incroyant et la science prêtent à l'énergie éternelle et indestructible ; plus, il est vrai, la pensée et la volonté, c'est-à-dire l'intention née au sein du pur esprit Dieu. Ce qui de toutes façons est absurde et vaut à peine de s'y arrêter : de même qu'il n'est pas très utile de discuter pour savoir si l'humidité existe en dehors de la vapeur d'eau, le vent en dehors du mouvement des couches d'air et la chaleur en dehors de celui des molécules, il est absurde de croire qu'une pensée et la conscience puissent exister en dehors du cerveau qui est matière chimique organisée et dont la réalité suppose un monde matériel déjà très évolué.

Si donc Dieu se contente juste de créer la première matière - ou la matière première peut-être plutôt - il ne peut avoir rien créé de l'ordre qui évoluera de la matière inerte vers la matière organique, puis à la vie jusqu'à l'homme qui n'est qu'un des résultats biologiques fortuits d'une très longue suite d'aléas évolutifs qu'il était impossible de prédire d'avance : en effet, l'évolution n'est jamais prédictible. Stephen Jay Gould, le célèbre paléontologiste américain, écrit que si par un étrange miracle (puisqu'on y est, n'hésitons pas) tout devait repartir de zéro, l'imprédictibilité est telle dans les événements qui ont vu émerger la vie et déterminer ses multiples formes, que les chances pour que l'évolution produise encore Homo sapiens seraient quasiment nulles. Finalement, la conscience aurait peut-être pu émerger au sein d'un être ressemblant aux créatures disparues des schistes de Burgess ou dans un pou. Bien sûr, l'argument ne vaut que ce qu'il vaut, mais il dit bien ce qu'il veut dire : qu'il n'y a pas d'intentionnalité dans la création, c'est-à-dire que l'homme n'a, du point de vue de la nature, pas plus de valeur qu'un moustique qu'elle a sans doute mis des millions d'années à développer, lui aussi. Car s'il y a le cadre nécessaire des lois, il y a la contingence du détail où tout (ou presque) est certes explicable, mais après coup seulement.

Ou bien alors il n'est plus question d'évolution, il faut abandonner cette théorie et croire au déterminisme et à ce que certains appellent pudiquement le dessein intelligent, à la transformation planifiée. Certes, me rétorquera le croyant évolutionniste malgré tout, je crois bien qu'il faut compter avec l'évolution dont les productions échappent à la volonté de Dieu, mais je crois que c'est Dieu qui dans sa grande sagesse a inventé arbitrairement les lois nécessaires de la nature, de la physique, de la chimie, etc.

Objection retenue ! Certes ; mais en ce cas, ce n'est donc plus Dieu qui crée la réalité du monde dans son actualisation, dans sa réalité : c'est le hasard. On ne saurait alors parler, avec l'apparition de l'homme au bout d'un très long lapse de temps, d'un couronnement de la création, d'un être créé à l'image de son créateur, puisque celui-ci n'est plus que le produit final d'une longue succession d'aléas et qu'il n'était dans ce cas nullement inscrit dans les choses dès leur origine. Ainsi donc, si l'on conserve la théorie de l'évolution, ce n'est plus Dieu qui crée l'homme, mais l'inverse : c'est lui, l'homme, produit contingent de la nature parmi des milliers d'autres espèces plus ou moins complexes, fruit du hasard déterminé à la fois par la nécessité des lois de la nature et par la contingence des développements - y compris ceux impulsés par les mouvements tectoniques et géologiques -, qui, se posant des questions, finit par imaginer son origine dans une toute puissante volonté préexistante pourtant quelque peu erratique par maints côtés. En réalité, le croyant ne fait qu'humaniser, qu'anthropomorphiser son Dieu prétendument pur esprit en lui attribuant ses propres facultés, celles du vouloir et de la pensée, ses propres sentiments et tout ce qui va avec, comme par exemple un fils qu'il aime mais qu'il va jusqu'à sacrifier sans hésiter par amour pour sa propre créature - on ne voit d'ailleurs pas trop bien pour quel intérêt et avantage pour lui -, etc. C'est en réalité la pensée fantasmagorique du croyant qui crée Dieu. Mais cela, nous le savions !


H.-P. Gottlos



Notes :
  1. Selon la célèbre formule Einsteinienne E = mc2
  2. Darwin, ce mécréant, aurait alors découvert l'un des secrets les mieux gardés de Dieu


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