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"Une chandelle dans les ténèbres"

Petit guide d'hygiène mentale

Les pseudo-thérapies sous l'oeil de la zététique


par Thierry Venot  -  17/06/2016




Les textes publiés dans Vos contributions (rouge foncé) ne représentent que l'opinion de leurs auteurs.




Sommaire :


Introduction


"Ce que les hommes veulent en fait, ce n'est ni la connaissance ni le doute mais la certitude". (Bertrand Russel)

"La seule vérité sacrée de la science c'est qu'il n'y a pas de vérité sacrée. Toutes les affirmations doivent être examinées avec un esprit critique. Les arguments d'autorité sont sans valeur. Tout ce qui ne correspond pas aux faits doit être rejeté ou révisé. La science n'est pas parfaite et elle est souvent mal utilisée. Elle est seulement un outil, mais c'est le meilleur outil que nous ayons". (Feuerbach)

Dans nos sociétés modernes, la science et ses applications technologiques prennent une place de plus en plus importante dans la vie quotidienne mais, paradoxalement, comme s'il s'agissait de contrebalancer cet essor vertigineux de la connaissance, on constate la résurgence de nombreuses formes d'obscurantisme. Diverses hypothèses sont avancées afin d'expliquer ce phénomène qui tend au rejet de la rationalité au profit de la pensée magique et du paranormal. Certains pensent que cette défiance vis-à-vis de la Raison est liée à la peur provoquée par les progrès de la recherche et plus particulièrement ceux réalisés dans le domaine de la compréhension du vivant. Cette crainte est renforcée par des dérives éthiques et des scandales qui, malheureusement, émaillent l'actualité. Au dix-neuvième siècle, époque pendant laquelle le scientisme régnait en maître, Emile Zola écrivait déjà :
"La science a-t-elle promis le bonheur ? Je ne le crois pas. Elle n'a promis que la vérité, et la question est de savoir si l'on fera jamais du bonheur avec de la vérité."
Quant à Georges Charpak, prix Nobel de physique, il pense que ce paradoxe trouve peut-être son origine dans le fossé qui s'est creusé entre, d'un côté, un univers technologique de plus en plus complexe et de l'autre, un niveau de culture scientifique de la population très médiocre. Dans son ouvrage "Devenez savant, devenez sorcier", il écrit :
"On assiste ainsi à une mystification de la connaissance qui a pour résultat une conception du monde dont de nombreux éléments sont irrémédiablement hors du champ de compréhension - donc du contrôle - de la majorité des individus. Cette pensée "ésotérique" induit une stratification du monde. Tout en haut, il y a ceux qui ont des pouvoirs et des connaissances : ils savent, comprennent et agissent. Loin en- dessous, il y a ceux qui s'étonnent, admirent, vénèrent et suivent sans comprendre ce qui débouche sur un fatalisme béat et la déresponsabilisation des individus."
Dorénavant, la "pensée" irrationnelle est portée d'une manière totalement décomplexée. Ceux qui s'y réfèrent ou la revendiquent n'hésitent plus à s'afficher et à s'exprimer publiquement sans craindre le ridicule. Pourtant, il semble évident que certaines de ces croyances sont si grotesques qu'il est difficilement imaginable qu'elles puissent être prises au sérieux même par les esprits les plus "fragiles"... Et bien, détrompez-vous ! Le fait que certaines ficelles soient un peu grosses ne nuit nullement au succès de beaucoup de ces théories fantaisistes ! Bien au contraire, le fait qu'elles se situent en dehors du cadre de la Raison est à l'origine d'une nouvelle forme de snobisme. Dorénavant, certains adeptes de ces théories ou de ces pratiques s'enorgueillissent d'évoluer dans une sphère de pensée qui fait fi de toute logique. Pourquoi s'embarrasser de fastidieux calculs, de recherches de preuves et de démonstrations complexes afin de comprendre ou de prouver la pertinence d'une théorie ? Ignares et fiers de l'être en quelque sorte ! Ce phénomène serait un moindre mal s'il se contentait de rester au niveau de la rhétorique, malheureusement, lorsqu'il s'agit de thérapies, certaines dérives peuvent parfois avoir des conséquences dramatiques. Voici quelques exemples de discours tenus par des thérapeutes ayant des pratiques dites "parallèles" :
  • Le cancer peut être guéri si le malade trouve l'origine de ses conflits émotionnels. Ceux-ci seraient la cause supposée de la maladie. La thérapie proposée consiste donc à chercher les cause de la "mal à dit" (jeu de mot "classique" emprunté à la psychanalyse) afin de s'en libérer définitivement. Entendons-nous bien, il n'est pas question de nier l'importance de la dimension psychologique dans l'apparition ou l'évolution d'une maladie. En revanche, faire de cette conviction le noyau central de l'origine du cancer relève de la supercherie intellectuelle voire de la folie douce. Le gros fumeur et le travailleur confronté à l'amiante, tous deux atteints du cancer du poumon, devraient donc faire une psychanalyse pour espérer guérir de leur maladie !
    "Plus que le mensonge, la conviction est l'ennemie de la vérité" (Friedrich Nietzsche)
  • Le Sida peut être guéri grâce à l'utilisation d'huiles essentielles.

  • Le biomagnétisme permettrait de diagnostiquer et de traiter toutes les pathologies grâce à la recherche de l'équilibre du niveau énergétique lié à la neutralité du potentiel d'hydrogène. Cette "plomberie magnétique" déboucherait les "conduits d'énergie" du corps humain à l'origine de toutes les maladies !

  • La déprogrammation biologique serait d'une efficacité redoutable d'autant que la thérapie peut se faire par ... consultation téléphonique ou par transmission de pensée (règlement par cartes bancaires accepté) !

La liste d'exemples pourrait être interminable ! Ce qui est inquiétant voire dangereux, c'est que les thérapeutes qui portent de telles idées ne sont, pour la plupart, ni des manipulateurs, ni des escrocs mais ceux-ci croient sincèrement à ce qu'ils affirment. Les partisans et les détracteurs de ces "thérapies" se livrent une guerre sans merci sur les blogs consacrés à ces sujets. La haine, les insultes et la violence y atteignent un niveau tel que de nombreux sites et forums ont eux ont dû être fermés.
"Les polémiques les plus féroces concernent des domaines dans lesquels il n'y a aucune sorte de preuve." (Bertrand Russell)
Dans son ouvrage "L'Ensorcellement du monde" Boris Cyrulnik fait le commentaire suivant :
"Inventez une charlatanerie, n'importe laquelle, même la plus folle, vous trouverez toujours des hommes qui diront que ça marche, tant notre besoin d'illusion est intense."

Il faut toutefois préciser que toutes les thérapies ou médecine dites "alternatives" ne sont pas des pseudo-thérapies. Par exemple, la phytothérapie qui s'appuie sur la connaissance empirique des plantes a des effets reconnus et a une réelle efficacité. Notons, que la pharmacopée moderne s'est largement inspirée et s'inspire toujours, de ces connaissances empiriques pour identifier, utiliser et synthétiser les principes actifs de nombreux médicaments. Ne dit-on pas que la forêt amazonienne est une pharmacie à ciel ouvert ?

Lorsqu'ils sont mis en cause, les tenants des pseudo-thérapies s'indignent ou se réfugient dans une posture victimaire dans laquelle ils se complaisent. Ces éternels opprimés seraient les martyrs d'une inquisition rationaliste. Dans une société qui perd l'échelle des valeurs liées aux savoirs universels, on a de plus en plus le sentiment que, dans beaucoup d'esprits, "tout se vaut". Cette indifférenciation entre les niveaux de pensée est à l'origine d'une forme de relativisme paresseux qui s'appuie sur une notion dévoyée des concepts de tolérance et de respect. Toute critique du charlatanisme est donc considérée comme un manque de tolérance de la part de gens obtus qui seraient incapables "de recevoir une parole différente", "d'accueillir une pensée alternative", "de faire preuve de relativisme et de tolérance", ou encore "de sortir d'un système de pensée sclérosé"... Que de belles formules empreintes de pseudo-sagesse ! Les détracteurs de ces thérapies sont présentés comme des intégristes rationalistes bornés. En réalité, alors que le doute est le pilier central de la science, les tenants des pseudo-thérapies - qui pourtant veulent donner des leçons de tolérance - n'autorisent aucune expression de l'esprit critique. Faute d'arguments sérieux, la foi et la conviction tiennent lieu de preuve. Les interrogations et les questions ne sont pas les bienvenues. Il n'y a pas d'autre alternative que l'adhésion totale, corps et âme. Protégé par ce "pare feu" moral qui renverse le système des valeurs établies et facilite ce totalitarisme de la pensée, le néo-obscurantisme peut prospérer sans entraves.

  • C'est ainsi que depuis quelques années les pseudosciences sont entrées à la faculté de médecine avec le faux nez de dizaines de thérapies diverses et variées.

  • C'est ainsi que sous le masque de la sociologie, une célèbre astrologue a vu sa thèse de doctorat validée par un jury universitaire dont la compétence et le sérieux ont été vivement remis en cause par le milieu scientifique. Comme le précise fort justement Rudolf Bkouche dans son article intitulé "pseudosciences", le charlatanisme concerne également ces universitaires en place qui font preuve d'incompétence. Ils sont à la fois les complices et les acteurs de cette mystification de la connaissance.

  • C'est ainsi que le créationnisme, cette théorie absurde qui fait commencer l'humanité il y a ¬6000 ans, signe l'entrée des mythes religieux dans certains espaces éducatifs au mépris de toute logique, voire du bon sens le plus élémentaire.

Ce renoncement généralisé qui prend de l'ampleur est très inquiétant mais ce qui l'est encore plus, c'est la passivité et l'absence de réactions fortes y compris dans le milieu scientifique qui, face à cette avalanche obscurantiste, semble baisser les bras et se laisser gagner par une forme de tolérance molle.

"La désaffection de la pratique religieuse ne témoigne pas du recul de la croyance. Au contraire, on peut même penser que la fin du monopole des professionnels de la foi a libéré l'irrationnel et généré un transfert vers une plus grande profusion de sacré, de religiosité et de soumission à la déraison." (Michel Onfray)


Pour expliquer les origines de cette résurgence et afin de lutter contre sa propagation, le laboratoire de zététique tire la sonnette d'alarme et tente, avec ses modestes moyens, de réagir en informant le public. Mais avant d'entrer dans le détail de cette lutte, voyons tout d'abord ce qui se cache derrière le mot "Zététique".


La zététique : une hygiène préventive du jugement

La zététique est définie comme "l'art du doute". Elle est présentée comme l'étude rationnelle des phénomènes "dits" paranormaux, des pseudosciences et des thérapies étranges. La zététique réserve ses analyses aux théories scientifiquement réfutables. De ce fait, elle ne pose pas la question des convictions religieuses qui, elles, échappent à toute analyse rationnelle. Son objectif est la mise à l'épreuve d'énoncés ou de faits qui parfois semblent pourvus de sens mais qui ne résistent pas à l'analyse scientifique. La zététique se réclame du scepticisme scientifique et plus généralement de la démarche du doute cartésien nécessaire en science comme en philosophie. La zététique est en fait le refus de toute affirmation dogmatique. Elle se veut - pour reprendre l'expression du biologiste Jean Rostand - une hygiène préventive du jugement. Pour expliquer les raisons de cette résurgence obscurantiste et pour lutter contre sa propagation, le laboratoire zététique de la faculté de Nice met en cause :
  • La caisse de résonance formée par les médias qui cherchent avant tout à faire de l'audience en faisant peu de cas de l'exigence intellectuelle.

  • La dérive déontologique du milieu journalistique plus soucieux de sensationnel que de la recherche de la vérité et de la vérification des faits A ce propos Noam Chomsky écrivait :
    "Les journalistes ont créé l'image d'une masse stupide qui doit être dirigée par des intellectuels intelligents. En fait, ce que nous avons souvent découvert c'est que ces intellectuels, ces classes éduquées, forment la partie la plus endoctrinée, la plus ignorante, la plus stupide de la population. Il y a de très bonnes raisons à cela. D'abord, en tant que population "lettrée", ils sont les premiers soumis à la propagande massive. Il y a une deuxième raison, plus importante et plus subtile. Ils sont des organisateurs idéologiques, par conséquent, ils doivent intérioriser la propagande et y croire."
  • La courroie de transmission que constitue le milieu éducatif qui ne joue plus son rôle. Par exemple, dans le domaine de l'enseignement des mathématiques, le système éducatif a abandonné de nombreux contenus comme la démonstration qui a pourtant pour vertu de développer la rigueur intellectuelle. Cet abandon des contenus enseignés va bien plus loin qu'un simple allègement des programmes, c'est une fracture anthropologique qui creuse un fossé entre la culture scientifique de la population et la technologie et réduit les citoyens au rôle de simples consommateurs.

  • Le flou qui entoure le mot "science" qui conduit à une utilisation abusive de l'adjectif "scientifique" afin de qualifier des matières, des théories ou des études dans lesquelles la notion de preuve est floue ou inexistante. Par exemple, l'Union Rationaliste classe Les Sciences de l'Education dans la catégorie des pseudosciences.

  • Une forme de relativisme qui nie toute forme de hiérarchie dans la connaissance. Tout se vaut en quelque sorte !

  • Le remplacement de la raison par la sensation c'est-à-dire la substitution du couple exigeant "symbole écrit + analyse étayée" par le couple paresseux "image visuelle + sensation immédiate".

  • Le silence coupable entretenu autour de certaines problématiques par le dévoiement des notions de tolérance ou de respect à l'égard des convictions d'autrui.

  • La peur face aux progrès phénoménaux de la science

Pour tenter de lutter contre cet obscurantisme moderne, le laboratoire zététique pense que la démystification nécessite :
  • De donner une interprétation scientifique des phénomènes considérés comme étranges

  • D'expliquer quels subterfuges ou quels raisonnements erronés pourraient être utilisés pour nous amener à croire à la véracité du phénomène ou de la pseudoscience.

  • De faire la différence entre un raisonnement cohérent et un sophisme ou un paralogisme et de donner à la population les moyens de démasquer ces subterfuges.
    Sophisme : Un sophisme est une argumentation à la logique fallacieuse. C'est un raisonnement qui cherche à paraître rigoureux mais qui n'est en réalité pas valide au sens de la logique.
    Exemples :
    Dans l'emmental, il y a des trous. Plus il y a d'emmental, plus il y a de trous mais plus il y a de trous, moins il y a d'emmental. Donc plus il y a d'emmental, moins il y a d'emmental
    Un problème comporte toujours au moins une solution. Donc s'il n'y a pas de solution, il n'y a pas de problème

    Paralogisme : Un paralogisme est un raisonnement faux qui apparaît comme rigoureux et où le locuteur est de bonne foi, contrairement au sophisme qui est un argument fallacieux.

  • De promouvoir le développement de la culture scientifique, notamment à l'école

  • D'apprendre les principes d'une observation scientifique (c'est-à-dire une expérimentation et une recherche impartiale des données)

  • D'apprendre à bien interpréter les résultats, et à en tirer les bonnes conclusions

"Transformer les citoyens en moutons soumis est le rêve de bien des pouvoirs. Pour y parvenir les moyens sont nombreux ; les intoxiquer de para-sciences peut être fort efficace." (Albert Jacquard)


Petit guide d'hygiène mentale

La zététique a pour objectif de donner à ceux qui le souhaitent des réponses scientifiques à des questions qui concernent les différentes formes d'expression du "paranormal" mais, bien entendu, elle n'interdit à personne de croire aux soucoupes volantes ni de se "soigner" avec de la poudre de perlimpinpin...Comment le pourrait-elle d'ailleurs ? Elle s'adresse à ceux qui sont désireux de sortir du prêt à penser, des dogmes, des croyances aveugles et des aprioris culturels. La zététique leur propose de faire confiance à leur intelligence et ce quel que soit leur niveau d'instruction.

Quelle est l'attitude à adopter quand une question se pose en nous renvoyant à un phénomène dit "paranormal" ? Comment l'examiner ? Quelles sont les questions à se poser ? Quelle méthode utiliser ? Celui qui cherche a besoin d'informations, d'outils et... d'imagination. En effet, la rationalité scientifique n'empiète en rien sur la liberté de penser ou de rêver et l'imagination vagabonde trouve toute sa place dans cette recherche. Il faut simplement veiller à ne pas confondre poésie, hypothèse de salon et hypothèse de travail. Pour être réellement efficace, celui qui veut comprendre doit avoir présentes à l'esprit quelques règles de Zététique. Il est légitime de s'intéresser aux phénomènes "hors de l'ordinaire" et nul ne cherche à interdire l'attrait voire la fascination pour le "paranormal" qui sont profondément ancrés en l'Homme. Toutefois, si d'aventure vous êtes réunis autour d'un guéridon avec des amis afin d'invoquer un esprit, plutôt que de poser assez classiquement la question "Esprit, es-tu là ?", Henri Broch propose de rajouter un petit adjectif et de vous poser la question ainsi :
"Esprit critique, es-tu là ?"

Pour être armé dans cette lutte contre vous-même, Henri Broch propose une liste des recommandations qu'il a appelé "nosodes". Cet arsenal réflexif vous permettra d'être outillés pour vous protéger contre les assauts du charlatanisme. Si vous ne voulez pas céder à la séduction et au confort douillet et sécurisant de l'illusion, vous constaterez qu'il n'est pas nécessaire d'avoir fait de longues études scientifiques pour pouvoir faire preuve d'esprit critique.
* Henri Broch, né le 8 novembre 1950 à Nice, est docteur en sciences, professeur de biophysique théorique à l'Université de Nice Sophia-Antipolis et directeur du Laboratoire de zététique. Il est l'auteur de plus de 130 publications et de 6 livres. Il a donné plus de 250 conférences dans le monde entier. Il a été président d'honneur du Cercle Zététique. Il est membre de l'Académie des Sciences de New York et du comité scientifique de l'AFIS (Association Française pour l'Information Scientifique). Il est le créateur du défi zététique international, inspiré par celui de l'illusionniste James Randi. Ce défi a pour objectif de mettre en évidence l'existence ou l'inexistence de phénomènes paranormaux. Une forte récompense est prévue pour récompenser celui ou celle qui réussira à abuser ces scientifiques vigilants. Jusqu'à ce jour, aucun de tous les nombreux parapsychologues, voyants, parascientifiques, mages ou illuminés qui se sont présentés pour faire reconnaître leurs pouvoirs supranaturels, n'a pu franchir la barrière des tests imposés par son laboratoire. La forte somme de 200 000 euros est toujours dans le coffre fort ... probablement pour longtemps encore ! Anecdote significative, il faut préciser que ce grand savant est plus connu pour l'admiration que lui voue le chanteur Stromaé que pour ses travaux scientifiques.

Les 7 nosodes d'Henri Broch et autres vaccins

Pourquoi Henri Broch emploie-t-il le mot "nosode" emprunté au vocabulaire de l'homéopathie ?

Un nosode est un médicament homéopathique dont l'effet serait d'augmenter la réponse immunitaire du patient. Le nosode est tiré de l'agent identifié comme déclencheur la maladie. C'est ainsi que pour guérir la fièvre, on utilisera un produit qui, chez un sujet sain, donne la fièvre. Par exemple, le nosode utilisé pour se protéger de la polio nécessite le liquide céphalorachidien obtenu par ponction lombaire sur des patients atteints de la maladie et pour soigner une maladie vénérienne purulente, on utilisera les sécrétions urétrales de ceux qui sont atteints de cette affection. L'idée de départ n'est pas idiote et elle nous rappelle le principe de la vaccination. En réalité, l'analogie s'arrête là et ce premier principe ne résiste pas à l'analyse. En effet, il est formellement établi, par le biais des analyses biologiques, que le nosode n'a absolument aucun rôle vaccinal et que de façon certaine, il ne confère aucune immunité. Pas l'ombre d'un anticorps !
Par analogie (mais aussi un peu par dérision), Henri Broch appelle donc "nosodes" les stimulations de l'esprit critique indispensables pour ne pas céder à la manipulation et sombrer dans la déraison liée à la pensée magique
Avant de partir à l'aventure et de tendre les bras à la première croyance venue, il est donc prudent de vous munir de l'attirail du zététicien, surtout si la croyance que l'on veut vous faire avaler s'entoure de tout un vocabulaire ésotérique ou d'un charabia pseudo-scientifique utilisé pour séduire ou pour brouiller les pistes. Pour vous prémunir contre le charlatanisme, voici les 7 nosodes de Broch, les 11 piqûres de rappel, les 8 vaccins de Monvoisin et nous terminerons par un bonus.

Nosode de Broch N°1

L'effet Boule de neige

Untel déclare que "Machin" a dit que "Chose" avait appris chez "Truc" que... Témoignage de énième main où chaque intermédiaire rajoute un élément de son cru à l'histoire de départ

Nosode de Broch N°2

L'effet Petits ruisseaux

Si les petits ruisseaux font les grandes rivières, les petits oublis et les fines erreurs permettent les grandioses théories. Question à se poser : tous les paramètres sont-ils donnés, et le sont-ils correctement (unités utilisées, cohérence globale, valeurs en fonction du temps..) ?

Nosode de Broch N°3

L'effet Cerceau

Cercle vicieux consistant à admettre au départ ce que l'on entend prouver par la démonstration que l'on va faire. Le point de départ est quelquefois sous-entendu.

Nosode de Broch N°4

L'effet Bi-Standard

L'effet bi-standard consiste à modifier les règles du jeu ou du contrat implicite en fonction des réponses (et/ou des joueurs) pendant le cours du jeu ou du contrat.
  • Si la science prouve ma thèse, alors j'ai raison (implicitement: la science est efficace, puisqu'elle corrobore mon point de vue).
  • Si la science infirme ma thèse, alors la science ne comprend rien et n'est portée que par un ramassis de scientifiques obtus et rassis (implicite : la science n'est pas efficace, puisqu'elle ne corrobore pas mon point de vue).

Nosode de Broch N°5

L'effet Bipède

L'effet Bipède consiste à raisonner à rebours vers une cause possible. Exemple dont cet effet tire son nom :
"L'existence des pantalons prouve que Dieu a voulu que nous soyons des bipèdes".
Ou encore...
"Si nous avons un nez, c'est bien évidemment pour pouvoir porter des lunettes."

Nosode de Broch N°6

L'effet Puits

Plus un discours est "profond" (dans le sens de... creux !), plus les auditeurs peuvent se reconnaître majoritairement, dans ce discours. L'effet Puits offre ainsi une succession de phrases creuses qui peuvent être acceptées comme foncièrement vraies par toute personne, chacun ajoutant lui-même les circonstances qui, seules, en font des phrases sensées. L'astrologie, la voyance et la psychanalyse s'appuient sur ce phénomène psychologique. Si par exemple un astrologue vous dit que d'après votre thème astral, vous êtes parfois plutôt en forme mais que vous avez souvent des moments de fatigue... Je ne vois qui pourrait lui donner tort !

Nosode de Broch N°7

L'effet Cigogne

Compter parmi ses amis trois barbus sympathiques ne dit rien sur l'humeur des barbus dans leur ensemble. Si avez plusieurs amis qui sont à la fois myopes et amateurs de bon vin cela ne prouve pas que le vin rend myope et encore moins que tous les myopes adorent la divine bouteille. Confondre corrélation et causalité est un biais fréquemment utilisé qui amène à tirer de fausses conclusions. De façon plus humoristique, Coluche préconisait de se frotter la tête avec du papier toilette pour éviter la chute des cheveux, il justifiait cette pratique avec l'argument suivant. "Voilà des années que je m'essuie le postérieur avec du papier toilette et, jusqu'à aujourd'hui, je n'ai pas perdu un seul poil !"


Les 11 Piqûres de rappel du Docteur Henri Broch

Piqûre de rappel n°1

L'analogie n'est pas une preuve

Une analogie est un outil pédagogique qui aide à faire comprendre quelque chose, mais elle ne peut pas être utilisée comme preuve. Ce n'est pas parce qu'une chose ou un phénomène ressemble à un ou une autre qu'elle en a les mêmes propriétés. En toute rigueur, il faut donner les limites d'une analogie ou d'une métaphore.

Piqûre de rappel n°2

La bonne foi n'est pas un argument

La plupart des gens, y compris les charlatans, sont de bonne foi, et relatent en toute honnêteté ce qu'ils ont vu ou vécu. Mais ce que l'on voit et ce que l'on vit peut être facilement remis en cause, car nos sens sont limités et possèdent quelques biais ; en outre, notre mémoire est loin d'être parfaite. De plus, beaucoup de notions employées dans la vie quotidienne sont subjectives : douleur, bonheur, sensations, bien-être...

Piqûre de rappel n°3

Accorder toute son importance à l'incertitude d'un résultat

Si je prétends qu'il y a une source d'eau à cet endroit, à 10 cm près, c'est intéressant. En revanche, si je donne l'endroit, à 3 km près, cela l'est beaucoup moins.

Piqûre de rappel n°4

Une analyse globale ou statistique est souvent concluante

Prenons un exemple : un médecin dit à quelqu'un : "vous allez mourir dans 3 semaines". Évidemment, c'est un peu maladroit. Qu'entend-il par là ? Il entend que sur tous les cas observés jusqu'à présent, la moyenne des décès se situait à 3 semaines. Mais (cf. piqûre de rappel précédente), on peut très bien avoir une survie moyenne de 3 semaines et quelques patients qui meurent dans l'instant (en apprenant la nouvelle par exemple !) et un qui ne meurt pas (ou disons 40 ans plus tard). Bien entendu, seul le cas de survie sera retenu, il sera décrit comme miraculeux ou éventuellement attribué à une pseudo-thérapie extraordinaire.

Piqûre de rappel n°5

Une théorie scientifique est testable et réfutable

Si elle ne l'est pas, il faut la ranger dans le domaine de la poésie, de la spéculation gratuite ou encore de la croyance. Bien entendu, on a le droit de rêver mais si je veux construire une théorie, il va falloir que je la teste pour qu'elle ait une quelconque valeur.

Piqûre de rappel n°6

L'origine de l'information est fondamentale

Demander la référence de ce que les gens disent est un peu pénible, mais cela permet faire le tri entre la rumeur, le fantasme et les faits.

Piqûre de rappel n°7

La force d'une croyance peut être immense

Il est parfois arrivé qu'un invalide se lève de son fauteuil roulant sur injonction d'un prédicateur ou sous l'effet d'une thérapie alternative. Malheureusement, dans la quasi totalité des cas, les invalides que l'on aide à se relever de leur fauteuil retombent comme des sacs. Mais, si par bonheur, le sujet se met tout à coup à marcher alors on ne gardera à l'esprit que ce cas unique. On criera au miracle et cette guérison "miraculeuse" sera élevée au rang de mythe pour renforcer une croyance ou une thérapie quelconque. En réalité, si l'on ramène ce problème au niveau des chiffres, ce fait n'a rien d'exceptionnel. En effet, il existe de nombreuses guérisons spontanées qui sont totalement inexpliquées par le milieu scientifique qui, lui, a l'humilité de reconnaître ses limites. Le nombre de ces guérisons est sans commune mesure avec celui revendiqué par les thérapeutes alternatifs. Ces guérisons inexpliquées concernent des maladies graves qui parfois sont à un stade très avancé. Elles concernent majoritairement les cancers mais également les maladies touchant les cellules sanguines ou la moelle osseuse. Bien évidemment personne ne parle de ces guérisons spontanées qui ne doivent rien aux pouvoirs supposés d'un gourou ou à ceux d'une thérapie "magique" !

Piqûre de rappel n°8

Se montrer prudent dans l'interprétation

Ce n'est pas parce qu'on trouve un morceau de verre poli et strié qu'il s'agit d'un joint de culasse de soucoupe volante. Ce n'est pas parce qu'il y a des ronds dans des champs de blé que ce sont forcément des extraterrestres qui s'y sont garés. D'ailleurs, pour confirmer une hypothèse extraordinaire, on demande, forcément, une preuve extraordinaire, tout cela pour éviter de prendre les messies pour des lanternes.

Piqûre de rappel n°9

Ne pas oublier l'exposition sélective et la validation subjective

Méfions-nous en distinguant ce qui nous paraît vrai de... ce qui nous plairait qu'il soit vrai. Les yeux du coeur ont une mauvaise vue...

Piqûre de rappel n°10

Un scénario n'est pas une loi

Ce n'est pas parce qu'on bâtit un scénario qui semble expliquer l'événement que c'est forcément ce qui s'est passé (cf. 2 piqûres précédentes).

Piqûre de rappel n°11

Le mode de rejet des données est significatif

Si, dans une étude, je rejette les données qui infirment mon hypothèse, et garde celles qui la confirment, alors je fais un tri qui n'a rien de scientifique, et qui sent la fraude.


Les vaccins de Monvoisin

Vaccin de Monvoisin n°1

Le faisceau de preuve

Ce sophisme consiste à faire croire que la réunion de plusieurs arguments dont chacun, pris à part, est douteux ou faible, constitue une preuve solide. En fait, un faisceau de preuves incertaines rend la preuve toute aussi incertaine. Il ne saurait être valide que si chacune des études considérées est valide par elle-même.

Vaccin de Monvoisin N°2

Ne jamais dire jamais

Vaccin de Monvoisin N°3

J'y crois donc c'est vrai

Eriger un système sur un acte de foi ou sur une intuition non corroborée par des expériences est permis, mais ce n'est pas de la science : ce n'est qu'une conviction. Ce vaccin découle souvent de la Piqûre N°10 (un scénario n'est pas une loi). Rappel : Le plus grand ennemi de la vérité n'est pas le mensonge délibéré mais la conviction !

Vaccin de Monvoisin N°4

L'argument d'autorité

Cela consiste à croire que quelque chose est vrai parce que la source d'information fait autorité. Cela doit être vrai parce que je l'ai lu dans le journal, vu à la télévision, parce que le médecin me l'a dit ou parce que quelqu'un que je respecte ou admire me l'a expliqué. Le principe d'autorité est très profondément ancré en médecine.

Vaccin de Monvoisin N°5

Le syndrome héroïque

Toute personne prétendant à une pseudo-théorie la considère presque toujours comme révolutionnaire et, en outre, elle s'estime persécutée. Face à l'incompréhension ou au scepticisme, elle se déclare martyr de l'inquisition scientifique et condamne l'Humanité à ne reconnaître son génie que de manière posthume. Ce syndrome découle souvent du Nosode de Broch N°4 (bi-standard), et entraîne le syndrome du Poulpe (cf. Vaccin N°6).

Vaccin de Monvoisin N°6

Le syndrome du poulpe

C'est la tendance à s'accrocher bec, ongles et tentacules à sa théorie, quitte à devoir attendre de mourir pour l'abandonner à la critique.

Vaccin de Monvoisin N°7

Le syndrome "Popeye"

Une chose rapportée, répétée, citée maintes et maintes fois, peut progressivement devenir vraie. Ce fut le cas du taux élevé en fer des épinards, démystifié par Hamblin.

Vaccin de Monvoisin N°8

Effet "7 travaux d'Hercule"

Appelé parfois "12 merveilles du monde", cet effet met en avant la tendance fâcheuse qu'ont certains personnages à user et abuser des nombres 7 et 12, comme si la charge symbolique de ces deux nombres portait en elle un pouvoir ou un effet magique. . .. Les 7 nains, le chandelier à 7 branches, les 7 péchés capitaux, les 7 mercenaires, les 7 merveilles du monde, les 12 apôtres, les 12 prophètes mineurs de l'Ancien Testament, les 12 fils d'Ismaël, les 12 fléaux, les 12 travaux d'Hercule, etc...

Bonus

Le lavement Poppérien

Il permet à une théorie d'écarter les sceptiques en incluant, dans leur système, la parade à toute réfutation. C'est, par exemple le cas de l'astrologie qui vous explique que si vous doutez de la pertinence de cette "science", c'est parce que, bien sûr, votre signe ou votre ascendant vous conduit à cette attitude de rejet. C'est également vrai pour la psychanalyse, qui explique que celles et ceux qui n'y croient pas sont des névrosés ! (A tous les coups on gagne !)


Vous voilà équipés pour vous prémunir du charlatanisme afin de ne pas vous égarer dans la jungle des discours tronqués, des pseudosciences et des pseudo-thérapies. Ne vous laissez pas séduire ni manipuler trop facilement sauf, bien entendu, si c'est ce que vous recherchez ! Posez-vous les bonnes questions ; faites confiance à votre intelligence ; doutez et brandissez le bon nosode, le bon vaccin ou la bonne piqûre de rappel au moment propice.

Pour vous entraîner à exercer votre esprit critique, faites comme moi, passez dès maintenant à l'analyse d'un cas concret. Vous constaterez alors que les sources théoriques à l'origine de certaines préparations, présentées comme médicinales, laissent pour le moins à désirer. Dans l'exemple présenté, on peut même parler de délire pur et simple. Pourtant, certains de ces produits sont en vente dans la pharmacie de votre quartier. Pour démasquer ces supercheries, il n'est pas nécessaire d'avoir fait des études savantes. Ayez confiance dans votre intelligence, dans votre faculté de raisonnement ou tout simplement, fiez-vous à votre bon sens. L'exemple des "fleurs de Bach" est tellement "énorme" qu'il se prête parfaitement à la pratique de cet exercice d'hygiène mentale. Ceux qui désirent aller plus loin trouveront une étude très complète à l'adresse suivante :
http://www.unice.fr/zetetique/articles/RM_Elixirs%20de%20Bach.pdf

Les élixirs floraux de Bach ou la quintessence d'une illusion

Présentation de la "thérapie"

Les fleurs de Bach sont des élixirs floraux initialement réalisés à partir de 7 essences de fleurs, ce nombre ayant été progressivement étendu à trente-huit. Elles tiennent leur nom de celui de leur concepteur, le Dr Edward Bach (1886-1936). Ce médecin qui s'intéressait à l'homéopathie, mena des "recherches" sur l'usage des fleurs de 1928 à 1936. Edward Bach pensait que l'équilibre émotionnel avait une influence positive sur la santé physique, tandis qu'un déséquilibre se traduisait par un impact négatif. Il s'intéressa davantage à la personne et à ses états émotionnels qu'à la maladie et ses symptômes... Jusque-là, rien de bien inquiétant ! Selon lui, les élixirs floraux auraient pour effet principal de stimuler la vitalité et d'harmoniser la vie psychique, en agissant sur les états émotionnels. Cette harmonisation serait rendue possible par le transfert des forces spirituelles contenues dans les fleurs, récoltées à l'état sauvage... Là ça se gâte ! En réalité, cette affirmation gratuite n'est étayée par aucune explication claire ni par la moindre preuve, même minimale ! Les sources théoriques de cette thérapie sont totalement inexistantes et Bach est resté très évasif sur sa démarche. Il s'est contenté de déclarer qu'il était parvenu à faire ses "découvertes" par l'exercice ... de sa sensibilité, de son intuition et de son inspiration ! Il déclara qu'il lui suffisait de tenir une fleur, de la regarder ou de goûter un pétale pour connaître intuitivement sa qualité thérapeutique !! Oui, vous avez bien lu : simplement regarder et goûter !
En préliminaire à cette étude il est nécessaire de définir sommairement la notion de "pensée magique"

La Pensée Magique

De manière générale, on appelle pensée magique l'idée que le fait de penser quelque chose est la même chose que de le faire. Elle s'exprime couramment dans les rêves et dans certains désordres mentaux. Chez les enfants elle est très intuitive et prévalente. Elle renvoie à la croyance que des pensées spécifiques, des verbalisations ou des gestes peuvent, d'une façon mystique, contribuer à l'accomplissement de certains désirs ou à prévenir certains maux. Les jeunes enfants et les peuples primitifs sont naturellement enclins à cette forme de pensée, comme conséquence semble-t-il de leur capacité limitée à comprendre la causalité. Même chez l'adulte, ce mode de pensée primitif, sans être prévalent, est le premier à nous venir à l'esprit de façon incontrôlée et peut parfois submerger la pensée rationnelle. A la suite des travaux de Frazer et de Mauss, on peut sommairement découper la pensée magique en trois formes principales.

La pensée magique de "similitude" ou de "signature"

Elle se résume au principe "Le semblable produit le semblable", en vertu duquel Cette pensée incite à croire que l'usage d'une substance peut être déduite de l'observation de sa présence dans la nature, et ses caractéristiques physiques augurent de ses propriétés.
  • Le suc de la chélidoine étant jaune, il soigne forcément la jaunisse.
  • L'ophioglosse ressemblant à une queue de serpent, il est clair qu'il en soigne les morsures. etc.

La pensée magique de "contagion"

Elle consiste à croire que les objets ou les personnes qui ont été en contact physique ou en association spatio-temporelle avec d'autres objets ou d'autres personnes restent connectés après avoir été séparés. L'ensorcellement, la magie, le symbole, le fétiche, les mots tabous fonctionnent sur ce mode.

La pensée magique d'"incorporation"

Elle laisse à penser que l'on s'approprie les qualités physiques de la chose que l'on incorpore. Pour ne donner qu'un exemple, on a longtemps cru que le fait de manger de la viande en grande quantité permettait d'être fort. Dans certaine sociétés tribales, les interdits alimentaires ainsi que certains tabous sont liés à cette croyance (par exemple, une femme enceinte devra s'abstenir de manger du canard pour que sont bébé ne naisse pas avec les pieds palmés). L'idée de devenir ce que l'on consomme est très utilisée par les publicitaires.


Analyse pas à pas de l'invraisemblable chaîne argumentaire employée par Bach pour fonder sa thérapie

Outils d'analyse : nosodes de Broch, piqures de rappel, vaccins de Monvoisin
La coordination "Donc" écrite en en caractère gras est employée est destinés à mettre en évidence l'incohérence (le mot est faible !) des liaisons entre des différents maillons de la chaîne "argumentaire" employée par Bach.

1ère phase

  1. Je crois en une causalité (non prouvée, simple analogie totalement gratuite) entre la personnalité et les poisons intestinaux. (Effet cigogne)
  2. Hahnemann, le créateur de l'homéopathie, croyait lui aussi, en une causalité (non prouvée, simple analogie) entre les maladies chroniques et les poisons intestinaux. (Effet cigogne)
Donc les maladies et la personnalité sont causales.
Résumé : Effet cigogne + effet cigogne + analogie = pseudo-preuve
Remarque : L'exercice pratique pourrait s'arrêter là car il suffit que le premier maillon de la chaîne soit corrodé pour que la suite n'ait plus la moindre pertinence ; toutefois, je n'ai pas pu résister à l'envie d'aller jusqu'au bout.

1ère phase bis

  1. Je veux distinguer des bacilles.
  2. J'aime bien le 7 car c'est un "joli" nombre chargé de symbolisme.
Donc, je distingue 7 bacilles (pas un de plus pas un de moins, pourquoi pas !)
Résumé : Effet "7 travaux d'Hercule" + force d'une croyance + scénario = invention

2ème phase

  1. Les maladies et la personnalité sont causales.
  2. Je distingue 7 bacilles.
Donc il y a 7 personnalités différentes (???) et chacune est associée à un bacille. (???!!!)

Résumé : Pseudo-preuve + invention + effet bipède = axiome N°1

3ème phase

  1. Il y a 7 personnalités différentes et chacune est associée à un bacille.
  2. Hahnemann a déclaré : "On soigne le mal par le mal"
Donc, je soigne avec les bacilles (nosodes)

Résumé : Axiome N°1+ pensée magique de similitude+ pensée magique de contagion = pseudo-thérapie N°1 (principe de "similitude" de l'homéopathie adapté aux états psychologiques)

4ème phase

  1. Les bacilles, c'est peu ragoûtant.
  2. Pourquoi ne pas soigner le mal par le bien, plutôt ? (Oh oui, super ! Ce serait tellement plus sympa !)
Donc, contrairement à l'homéopathie, je vais soigner le mal par le bien (car effectivement, c'est beaucoup plus sympa !)

Résumé : Thérapie N°1+ pensée magique d'incorporation = Axiome N°2

5ème phase

  1. Le bien, c'est la nature la plus simple et la plus belle (pourquoi pas !).
  2. La nature la plus simple et la plus belle, c'est la plante et surtout la fleur !
Donc, mes remèdes seront donc issus des fleurs.
Résumé : Axiome n°2 + naturalisme "baba cool" + analogie = Axiome n°3

6ème phase

  1. Quoi de plus beau qu'une fleur dans la nature ?
  2. Quoi de plus pur que la rosée du matin ?
Donc, le principe actif, ce sera la rosée déposée sur la fleur.

Résumé : Axiome n°3 + 2 analogies = Axiome n°4

7ème phase

    La rosée de la fleur, c'est vraiment l'idéal, malheureusement, elle n'est pas facile à recueillir (oui en effet, quel dommage !)
Donc, je solarise et je porte à ébullition, c'est plus facile.

Résumé : Axiome n°4 + bricolage ad hoc = Technique pharmaco-(pas)-logique

8ème phase

  1. Les Anciens ont dit que chaque fleur avait une action spécifique.
  2. Les Anciens sont souvent des puits d'expérience et de sagesse.
Donc, chaque fleur doit avoir une action. Par chance, cette action je sais intuitivement la détecter en regardant la plante ou en goutant ses pétales (quel don incroyable !)

Résumé : Technique pharmaco-(pas)-logique + argument traditionaliste qui sent bon le fromage de chèvre = Axiome n°5

9ème phase

  1. Chaque fleur a une action.
  2. Cette action on ne la voit pas, mais on ne voit pas non plus l'énergie (et toc !)
Donc, la fleur agit grâce à son énergie.
Résumé : Axiome n°5 + effet puits + analogie hasardeuse= Pseudo-théorie n°1 bis

10ème phase

  1. La fleur agit grâce à son énergie.
  2. Le mot "énergie" est trop commun en revanche l'expression "résonance énergétique" fait beaucoup sérieux, elle "sonne" beaucoup plus scientifique.
Donc la fleur agit par .... Résonance énergétique (??!!)

Résumé : Pseudo-théorie + effet Canada Dry = Pseudo-théorie n°2

11ème phase

  1. Je trouve 7, puis 12, puis 38 fleurs avant de mourir.
  2. Je décris 7 puis 12 puis 38 états psychologiques à soigner.
Donc à chaque état psychologique correspond une fleur et chaque fleur soigne un état psychologique.

Résumé : Pseudo-théorie n°2 + effet "7 travaux d'Hercule" + adaptation des mesures = Pseudo-thérapie finale


Une 12ème phase est celle qu'ont empruntée les héritiers de Bach :
Bach s'est arrêté à 38. Donc 38 c'est très bien, on s'arrête là ! (Effet bipède)
Voila ! Le "cheminement théorique" utilisé par Bach, qui jusqu'à présent était un secret bien gardé, vous est enfin révélé.
En résumé : Genèse d'une pseudo-thérapie

Effet cigogne + effet cigogne + analogie = pseudo-preuve
Effet "7 travaux d'Hercule" + force d.une croyance + scénario = invention
Axiome N°1+ pensée magique de similitude*+ pensée magique de contagion* =
Pseudo-thérapie n°1
Thérapie N°1+ pensée magique d'incorporation = Axiome n°2
Axiome n°2 + naturalisme + analogie = Axiome n°3
Axiome n°3 + 2 analogies = Axiome n°4
Axiome n°4 + bricolage ad hoc = Technique pharmaco-(pas)-logique
Technique pharmaco-(pas)-logique + argument traditionaliste = Axiome n°5
Axiome n°5 + effet puits + analogie = Pseudo-théorie n°1bis
Pseudo-théorie + effet Canada Dry = Pseudo-théorie n°2
Pseudo-théorie n°2 + effet "7 travaux d'Hercule" + adaptation des mesures
=
Pseudo-thérapie finale

Le processus de fabrication des élixirs floraux, fondé sur la dilution, s'inspire grandement de celui utilisé pour les granules homéopathiques, toutefois, contrairement à Hahnemann, Bach n'utilise pas le principe de dynamisation.
Rappel du principe de dilution :

La dilution homéopathique
La dilution homéopathique a été traitée en long, en large et même en travers. Rappelons-en sommairement le protocole.
La méthode de dilution consiste à mettre une goutte de produit prétendument actif dans 99 gouttes de solvant. On parle alors d'une Centésimale Hahnemannienne, (du nom de Hahnemann, le fondateur) ou 1CH.
Pour 2CH nous avons donc 1 dix millième (1/10.000) de principe "dit" actif, pour 3CH = 1 millionième (1/1.000.000), etc. jusqu'à 30 CH où le chiffre obtenu a un dénominateur suivi de 60 zéros. F. Grandemange nous explique alors qu'à partir d'une certaine limite, un produit actif dilué dans un corps est considéré comme absent tout simplement de par le nombre de ses molécules dans la substance étudiée. Le nombre d'Avogadro, qui est le nombre de molécules dans une mole de substance pure, est de l'ordre de 10 puissance 23. Or, un médicament homéopathique en dilution 30CH a une dilution de l'ordre de 10 puissance 60 de la substance d'origine. Il est donc absolument impossible que le médicament contienne une seule molécule du produit d'origine. La limite pour qu'une substance soit physiquement présente est de l'ordre de 12CH maximum, limite au-delà de laquelle plus une seule molécule de la substance diluée n'est présente. Pour se faire une idée, voici un petit tableau des équivalences qui vous surprendra peut-être mais qui vous permettra de vous faire une idée sur les dilutions proposées par les laboratoires homéopathiques censées vous guérir de vos maux :

Tableau des équivalences
  • 4 CH = une goutte de la substance de produit actif initial dans une piscine de jardin,
  • 5 CH = une goutte de cette même substance dans une piscine olympique,
  • 6 CH = une goutte dans un étang de 250 m de diamètre,
  • 7 CH = une goutte dans un petit lac,
  • 8 CH = une goutte dans un grand lac de 10 km² par 20 m de profondeur,
  • 9 CH = une goutte dans un très grand lac de 200 km² par 50 m de profondeur,
  • 10 CH = une goutte dans la Baie d'Hudson,
  • 11 CH = une goutte dans la mer Méditerranée,
  • 12 CH = une goutte dans tous les océans de la planète,
  • 30 CH = une goutte dans un milliard de milliard de milliard de milliard de fois toute l'eau de tous les océans de la planète.

Penser que la dilution homéopathique ménage encore une action relève soit d'un mystère non élucidé soit de la pensée magique dite "de contagion".

Question : Comment un médicament ne contenant pas la moindre trace de substance supposée active (en réalité, il n'en est rien !) pourrait-il avoir une efficacité thérapeutique ?

Réponse : Mais voyons, c'est bien sûr ! Grâce à la dynamisation.

"L'énergétisation", "la dynamisation", ou encore la "succussion" est le principe le plus extraordinaire de l'homéopathie, il consiste à agiter le flacon afin que les molécules, (voire "la" molécule encore présente si toutefois il en reste une) ou le "message" (voir articles sur la mémoire de l'eau) qu'elles ont laissé dans la dilution amplifient leurs effets. Le granule serait donc un médicament informationnel (??!!).

"Ce sont ces secousses qui devaient pallier l'absence de matière considérée comme active, imprimant dans le solvant une information immatérielle (!!??). Nous passons sur les tentatives de justifications pseudo-scientifiques totalement ridicules, dans lesquelles la liaison hydrogène est malmenée d'une manière qui fait pleurer de rire les physiciens du monde entier". Il n'est d'ailleurs pas nécessaire d'être physicien pour sourire !


Conclusion (provisoire)

Même si elle aisément invalidée par le milieu scientifique, une théorie qui repose sur la croyance, la magie ou la sorcellerie peut difficilement être totalement discréditée car les pseudo-thérapies ont parfois des effets positifs. Contrairement à ce que pensent de nombreux sceptiques, l'efficacité de ces préparations délirantes est loin d'être nulle. En effet, toutes, absolument toutes les expérimentations sérieuses réalisées par des laboratoires indépendants (et elles sont très nombreuses !) montrent que cette efficacité est en tout point strictement identique à celle d'un placébo (voir les expériences menées sur les Fleurs de Bach). Bien entendu, cette faible efficacité ne remet pas en cause le fait que ces thérapies farfelues, souvent réservées à la "bobologie", sont sans la moindre validité scientifique mais cela confirme la réalité et la constance de l'effet placébo et ce quel que soit la nature de la substance ingérée par le malade ... Ces pseudo-thérapies sont donc à classer dans le rang des médecines symboliques ou magiques. En France, contrairement aux autres médicaments qui doivent être testés durant de longues années avant leur mise sur le marché, ces préparations sont "miraculeusement" dispensées de prouver leur efficacité pour être vendues en pharmacie ... étrange, non ? Foi, certitude et absence de preuve d'un côté ; doute, longue expérimentation et preuve de l'autre ! A ce propos Bertrand Russell écrivait :
"L'ennui dans ce monde, c'est que les idiots sont sûrs d'eux alors que les gens sensés sont pleins de doutes."
Si cette petite étude vous a effrayés ou plongés dans l'angoisse, sachez que la thérapie des fleurs de Bach a une solution adaptée à votre problème. En effet, sachez qu'il existe un élixir adapté à l'origine particulière de votre éventuel sentiment de panique :
Elixir pour la peur de l'avion, pour la peur de l'engagement, pour la peur de l'échec, pour la peur de l'abandon et ... pour la peur de conduire !

Toutefois, une chose est certaine, contrairement aux médicaments allopathiques* (dont la population use et abuse sans modération sous la pression du lobby pharmaceutique) qui sont efficaces mais agressifs pour l'organisme, voire extrêmement toxiques, vous ne prenez aucun risque en suçant des granules exclusivement composés de sucre. De plus, vous pouvez compter sur un effet placébo qui est loin d'être négligeable tout en réduisant le déficit de la sécurité sociale. Toutefois en cas de symptômes inquiétant ou de "véritables" problèmes de santé, laissez vos granules de côté et consultez votre médecin d'urgence. D'ailleurs, le plus souvent, quand le processus vital est en jeu, on constate que beaucoup d'adeptes des pseudo-thérapies abandonnent subitement leurs convictions (ou postures) pour se tourner vers la médecine rationnelle ... jusqu'alors tant décriée ! Hormis chez certains illuminés, le réel, la peur et l'instinct de survie sont probablement les meilleurs antidotes pour lutter contre la pensée magique ? Les pseudo-thérapies seraient-elles réservées aux gens en bonne santé ?
* terme inventé par les homéopathes pour se démarquer de la médecine scientifique

Concernant les élixirs floraux, Henri Broch ne doute pas que des "études" surgiront (le plus souvent financées par le puissant lobby "Flower Essence Society"). Ces études prétendront, encore et encore, mettre en évidence des phénomènes thérapeutiques nouveaux. En toute honnêteté, les sceptiques continueront donc à se conformer à l'art du doute qu'ils promulguent. Ils analyseront patiemment toutes ces publications et tous ces travaux. Même si parfois ils doivent se pincer les lèvres pour ne pas pouffer de rire, les savants seront encore prêts, avec un souci d'objectivité, à participer à de nouvelles expérimentations et à revoir, le cas échéant, tout ou partie de ce dossier.
Toutefois, tout comme ce fut le cas pour le Suaire de Turin, la thérapie des Fleurs de Bach risque de ressembler au monstre du Loch Ness ou à ce que Paul Kurtz appelle le "syndrome du canard en plastique" : "Plus vous l'enfoncez au fond de la baignoire, plus vite il revient à la surface" ce qui prouve que comme l'affirme le professeur Henri Broch dans la piqure de rappel numéro sept "la force d'une croyance peut être immense".


Thierry Venot



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