Si je suis d'accord avec la première partie de l'exposé traitant du prosélytisme "VRP" mis en oeuvre par toutes les religions et la faiblesse de l'athéisme à cet égard (que je trouve saine mais ce n'est pas le sujet), je voudrais répondre car j'estime que la fonction d'un édifice religieux n'est pas uniquement celle décrite ici.
L'intérêt d'un édifice religieux
Pour revenir sur la notion du prosélytisme des édifices religieux, j'ai envie de nuancer leur effet.
Autant à une époque où la construction d'une église mobilisait les dons et le travail d'un village entier pendant plusieurs années, cela pouvait sans doute encourager les gens dans leur foi en les réunissant activement autour d'un projet spirituel. Aujourd'hui, où on élève des tours de 40 étages tous les ans, la construction d'une église/mosquée/synagogue par une entreprise de BTP ne représente plus ni une prouesse technique ou architecturale ni un travail en commun mais uniquement une représentation artistique de la foi partagée par un groupe de donateurs et de croyants.
De même, il serait peu flatteur pour l'intelligence humaine de dire qu'en voyant un temple, on change de religion. Au prix de la construction, ce serait sûrement plus intéressant de passer du temps en porte à porte ou en démarches individuelles. Les sectes l'ont bien compris, ce sont celles qui pratiquent le prosélytisme le plus important et leur principal moyen d'action est justement le démarchage.
En conséquence de quoi, je pose la question : à quoi peut aussi servir un bâtiment de culte ? Je pense qu'il ne faut pas généraliser le comportement religieux qui vise à convaincre autrui à tout prix. Il existe bien sûr des groupes qui ont cet objectif mais une grande majorité de croyants souhaite sûrement vivre sa foi pleinement sans particulièrement avoir de comportement de prosélytisme actif. Or, pour vivre sa foi, le point de rencontre est souvent capital.
Prier au salon
Ce lieu permet de se regrouper, de prier, de partager. On ne peut hélas pas appliquer le "ils peuvent le faire dans leur salon" à ce type de comportement.
Pour beaucoup, à partir du moment où en croit en un Dieu tout-puissant, créateur du monde (etc.), on ne peut pas lui rendre grâce dans un salon entre deux canapés et avec la télé en veille cachée sous un drap. Une cérémonie religieuse est un acte qui a une signification particulière et qui nécessite donc un lieu particulier. Retirer ce lieu à un croyant, c'est l'amputer d'une partie de sa foi.
J'aurais certes plus d'affinités avec quelqu'un qui prierait en pleine nature qu'avec celui qui prie dans un bâtiment fermé plein d'artefacts de fabrication humaine mais j'estime que chacun peut choisir sa façon d'accomplir un acte de foi.
Une gêne ?
Pour un athée respectueux des croyants ou même indifférent, la vue sur une église ou une mosquée ne devrait pas être plus gênante que la vue sur un nouvel immeuble ou un nouveau monument quelconque. Je dirais même qu'étant en général décorés, ces édifices sont plus un agrément qu'une gêne. Côté architectural, il s'agit d'une question de goût : classique ou moderne, vous préférerez la vue sur Notre-Dame ou sur Beaubourg. Je préférerai voir un minaret qu'une tour avec un panneau "Marque X" qui clignote 24h/24. C'est une forme d'art et chacun peut l'admirer librement sans pour autant être sensible à sa résonance religieuse.
Généralement, je suis pour le respect des règles applicables à toute construction et à tout citoyen. Pour le bruit, au-delà d'un certain seuil, c'est du tapage. Que ce soit par la voix ou par des cloches. Pour la hauteur, les autorisations doivent être accordées comme habituellement. La construction d'un parking requise si la zone ne comporte pas (ou peu) de places de stationnement.
Etc.
Conclusion
Je pense qu'il est important, pour préserver un équilibre social et un respect mutuel, que chacun puisse vivre sa foi sans avoir le sentiment d'être humilié (en priant dans une cave) ou bridé par rapport aux autres religions ou modes de pensée. A partir du moment où on offre un lieu défini pour se réunir, prier, réaliser des rituels, la Foi doit s'apaiser et le croyant, au lieu de se focaliser sur les difficultés qu'il a à pratiquer sa religion, peut réfléchir à sa façon de la vivre. Et si ça signifie que les sectes ont aussi le droit de construire des temples, grand bien leur fasse, on saura plus facilement où aller distribuer des tracts athées.
Je me rends compte que mon raisonnement est valable seulement si on considère secondaire que le bâtiment ait pour objectif de "signifier que l’on est le seul représentant du Très Haut, puisqu’on le crie bien fort". J'ai envie de croire que les gens sont plus malins que ça et que la seule vue d'un mur ne suffit pas à les faire changer d'avis. Surtout pour en adopter un opposé. Peut être ai-je tort mais je crois sincèrement que la discussion (via un écrit ou en direct) est la seule façon réaliste de convaincre autrui.
Ainsi, je milite également pour que les nouveaux monuments érigés par la société "ne soient que des temples de la pensée" et du savoir, "élégantes bibliothèques, majestueuses universités, somptueux musées". Mais ne tombons pas dans l'excès inverse en refusant à chacun le droit de manifester sa religion. L'article 18 de la déclaration universelle des droits de l'homme dit ceci : "Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu'en privé, par l'enseignement, les pratiques, le culte et l'accomplissement des rites".
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