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Dieu est une culture

La chose et le mot


par M.G.  -  21/02/2016




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"Nous savons que ce que nous considérons comme sacré sera vraisemblablement traité avec soin et respect." (1) Le sacré ? Il est dans la nature ou la culture ? Comprendre la nature sans profaner les "cultures qui croient être à l'origine de la création", c'est possible ?

"L'univers est" parce que "la matière s'organise" donc "Dieu existe". Les "croyants" tirent allègrement un fil d'Ariane entre les deux. La métaphysique "surpasse" de loin toute explication scientifique et consciente du phénomène astrophysique". (Mysticisme)

Les "Réalités intelligibles" ont-elles été déformées au travers l'enchevêtrement des multiples courants philosophiques ? Que suggérait la "philosophie première" ? Que le pouvoir d'organisation de la matière avait été pensé (dessein intelligent) ou qu'il pouvait être compris et décrypté par l'esprit humain (naturalisme philosophique) ? "Le dessein intelligent" c'est le pouvoir d'organisation et d'action de la matière ou d'une société (culture). Dieu est une culture.

À la "frontière du concret et de l'abstrait" se trouve aussi le "paradigme philosophique" qui place la culture au-devant et au-dessus de son propre fondement naturel, le genre humain. La nature humaine aurait émergé parce que le processus de culturation a su jouer son rôle de création et s'opposer aux "lois éliminatoires de l'évolution" remplaçant la barbarie par la civilisation. Pour accéder à la civilisation et profiter de son effet "humanisant et noble", l'Homme "a dû quitter son milieu naturel" pour s'en affranchir définitivement et s'enfermer dans une sphère culturelle "antigénique et transcendante" séparant ainsi le champ des événements naturels /du champ de la pensée et de l'action humaine. (Évolutionnisme /Créationnisme). Dissocier l'existence humaine du reste de la nature en lui donnant des origines surnaturelles (naissance par la culture) constitue une fracture philosophique qui n'est pas sans incidence sur notre biologique, notre sentiment d'être. Par la culture, l'existence humaine "s'élève au-dessus de la nature". L'émergence progressive de la morale ou du sentiment humain serait donc plus une affaire de culture que de nature.

La culture est devenue source de "la cause intelligente". La nature humaine est "parce que la culture l'a mise au monde". Une "seconde création" qui vise à corriger le caractère profane et instable de notre primitivité génétique. La forme intelligible aurait engendré le matérialisme universel de la même façon que la culture, aurait façonné, par son effet transcendant ou réversif, l'humanité. Alors quand vient le temps de rendre compte d'une généalogie de la morale (éthique humaine), la nature est écartée d'emblée pour "cause de primitivité". Drôle de conclusion qui en effet guide tant la logique humaine (cogito) que sa démarche.

C'est ce "principe idéaliste et surnaturel" qui fait de la culture une source d'esprit supérieur à la nature qui est devenu "irréfutable et improuvable". "Le spirituel est culturel et non naturel". (Platon) "Le logos" nous est donné par la culture ? Il est pourtant plus aisé de penser que l'esprit humain a précédé, dans le temps et l'espace, toute culture et qu'il est la source évolutive du "monde des Idées" et de la "Connaissance". Le "gène crée le mème" et non l'inverse. L'esprit est dans la nature. Pas de nature, pas de culture.

Faire de la "culture" la "source d'esprit" le principe créateur et vital, qui aurait permis en notre état cette "parcelle d'humanité" est une attitude foncièrement créationniste ", la nature en étant complètement démuni en son essence. Un fixisme idéologique avec une conception absolutiste du rapport identitaire culture/nature. Le fond crée les formes intelligibles" (2). La nature crée sa culture et son idéel. L'esprit d'une culture est le reflet d'une nature pensante, sans plus. Un principe d'évolution sans créationnisme. (Le monisme)

Il existe une relation entre le fait constaté et le concept; la chose et le mot. D'une part, il y a les concepts qui résument le fait observé, et ceux qui, d'autre part, créent l'objet; la créativité humaine. La lune, par exemple, n'a pas besoin d'être vue ou pensée pour être; la lune est une composition naturellement fondée. Par contre, son exploration fut envisagée, pensée, conceptualisée et humainement fondée. "Le drapeau américain lunaire en témoigne".

La chose et le mot

Si la chose a besoin d'être pensée pour être, alors cette chose est une "création du vivant" et devient un avoir et un fait de culture. Les "acariens" existaient avant le mot alors que dans le cas d'une "prothèse, d'une télé ou d'un conte fantastique de Noël" l'idée a précédé le mot et l'invention humaine, la chose. Le pétrole est un produit de la nature. Sa transformation, un fait culturel. "Éole" est une perception-représentation du phénomène "vent" et non sa création. On peut toujours emprunter un vocabulaire se voulant essentiellement empirique avec une approche matérialiste et moderne que cela ne change rien au fait qu'un concept, même scientifique, est anthropologique (qui résulte de l'action et de la pensée humaine).

L'évolutionnisme est une théorisation qui souhaite rendre compte des mécanismes évolutifs opérants au sein de la nature (science de la nature). Le créationnisme est aussi une théorisation (plus globale) qui s'affiche comme étant le principe d'explication du fait cosmique. Alors quelle différence y-a-t-il entre ces deux théories qui permettrait une différenciation et un déclassement ? L'évolutionnisme n'a pas pour revendication d'avoir créé ni les lois de l'univers, ni les lois du vivant. Le créationnisme, une culture, une théorie, un entendement, une "logique culturelle" a cette prétention-ambition. Comment apparenter la "logique du vivant" à la "logique humaine" sans passer par une "logique de Dieu" ? (biologie, ontologie, théologie)

La métaphysique se prononce formellement sur le caractère prédominant du culturel sur le naturel. Un pacte en soi sur l'ordre et le salut humain. La culture est devenue, par substitution inconsciente ou abdication, dépositaire plénipotentiaire de notre condition humaine et la Connaissance un pouvoir sur la nature. En tant que philosophie c'est avant tout un énoncé culturel auquel on croit ou non, pas "le fait cosmique, ni sa cause". Le mot ne décrit donc pas le "phénomène universellement perçu". La métaphysique n'est pas l'univers, ni son dessus, ni son dessous. C'est une carte, pas le pays, mais une représentation du fait observé. La carte est une conceptualisation, pas une conception ni une cause. La métaphysique est un entendement humain, une mise en forme par la pensée humaine, une représentation du fait cosmique-anthropique, et non pas le fait cosmique et encore moins la cause de toute l'organisation spatio-temporelle. Un idéel sans hommerie est-il possible ? Un idéel, même révélé, ne peut donc pas être à l'origine des lois physiques de l'univers pas plus que la culture (religieuse ou scientifique) n'est source et cause de la "raison, de la logique". La culture n'est pas une source de création mais un facteur d'évolution qui reflète une créativité humaine avec un pouvoir d'orientation et un degré d'organisation. La culture n'a pas engendré la nature humaine ni son "humanitude" et la métaphysique n'est pas à l'origine des lois physiques de l'univers. La philosophie est un raisonnement sur la nature, un fait de culture pas un fait de nature cosmique, sauf si on reconnaît que la culture est un produit de la nature humaine.

La métaphysique est une approche fragmentée et fragmentaire de la réalité qui n'a donc rien d'holistique, d'intégrale, d'universelle. Elle dissocie la gouverne du pouvoir physique, l'idéel du matériel, et illusoirement, la philosophie de la vie matérielle. La réalité (cosmique et terrestre) est irréfutable. Notre entendement est réfutable. C'est ce qui permet l'évolution des idées. Certains concepts collent mieux au fait et ils demeurent perfectibles, indéfiniment perfectibles au contraire de la métaphysique qui a pour prétention d'être irréfutable de part son "axiome incontestable"; "le spirituel est culturel et supérieur à la nature".

Comme si toute l'humanité entière s'était mise, à son corps défendant, sous la "protection et le joug" d'une culture prétendument capable de contenir et restreindre, voire sublimer les "scories de notre primitivité génétique". La Culture Mondiale est, en effet, une sorte "d'esprit immatériel consensuel" hors nature socialement objectivé qui conditionne autant notre vie matérielle qu'intellectuelle. Le principe rationnel et non sensible ? Ce sont les effets néfastes d'une culture qui postule une supériorité de l'esprit sur la matière. En réalité, sommes-nous si inconscient du fait que c'est la conscience humaine qui, par le biais de toutes ses connaissances et croyances, gouverne le monde derrière ce bouclier contre nature et qui décide de notre bien-être et mal-être ? Qui d'autre ?

Certains évoqueront la "sélection divine" (3) d'autres, la "sélection naturelle" (4) pour renoncer au libre arbitre humain et justifier le principe philosophique qui veut que l'homme ne soit pas le maître de sa conscience individuelle et collective et l'artisan de sa propre condition humaine. Un moralisme à l'humanisme réduit. Le "mythe de Caïn et Abel". Une morale de domination de la nature (5) en quête d'une morale de libération; ecce homo.

Cette métaphysique absolutiste devient, aussi contradictoire que cela puisse paraitre, une "philosophie purement matérialiste", qui plus est une "idéalisation du matérialisme". Rien de commun avec un "matérialisme philosophique et intégral" qui serait capable d'orienter le développement physique et matériel dans un sens humain et respectueux de la nature. La conscience humaine redevient ici la source évolutive de sa propre culture.

Qui aurait pu prédire qu'une telle séparation philosophique de l'esprit et la matière, de l'idéel et de la nature auraient une telle incidence sur la réalité humaine et la vie matérielle ? La métaphysique est un matérialisme dualiste qui sépare le "spirituel du réel" et qui explique le fait que le domaine de la connaissance et le sens humain sont trop souvent contre-évolutifs. Nul besoin de remonter à la Cause de l'univers pour illustrer le fait qu'elle est avant tout un raisonnement humain, un regard anthropique sur "soi-même et la réalité ambiante" et n'est nullement une préséance explicative du fait lui-même.

Matérialisme Universel

Avant Darwin et Cie, les questionnements sur les mutations n'étaient pas une préoccupation "religieuse". La connaissance, le culturel, la créativité procèdent donc du naturel; comment pourrait-il en être autrement ? Dire qu'une Culture et son esprit créatif engendrent la nature et le sentiment d'être (je pense, donc je suis) est un non-sens naturel et universel. L'esprit humain est donc, par essence, évolutionniste et créatif, pas nécessairement créationniste. L'UNIVERS existait bien avant l'esprit capable de se le représenter sous une forme anthropomorphique ou anthropocentrique.

La matière porte l'idéel et l'idéel crée à son tour. En termes clairs ou matérialistes, les circonvolutions du cerveau ont précédé l'idée révélée ou comprise et les plis vocaux ont précédé le mot (métaphysique/astrophysique), sans nier le fait que l'exercice des mots ait pu favoriser le développement des organes et de la pensée; dialectique de la nature. La culture est le reflet et l'expression d'une humanité. L'être humain fait sa culture et assure son évolution avec un certain capital d'erreurs/essais.

Une mise en forme de la pensée par la culture ne crée pas la nature. Elle symbolise la connaissance que l'on en a. Le questionnement sur les origines de l'univers (et la nôtre) n'a jamais été inaccessible à l'intelligence humaine (même chez les "primitifs"); seules les "vraies réponses" peuvent paraître inaccessibles et les "mythologies" ont probablement eu pour rôle de combler les lacunes de ce "no man land", faute de mieux. Un concept qui colle à un fait tente de décrire ou décrit cette réalité. Un concept qui ne colle à aucune "réalité présente" est soit une future découverte, soit une fiction.

Le théisme et l'athéisme n'entrent en jeu qu'à partir du moment où l'on retient la thèse du grand océan métaphysique et son dualisme surnaturel/naturel et qu'on prête foi à un édit culturel (humain et non cosmique) voulant qu'un "arrière-monde spirituel" (formes intelligibles) puisse gouverner le monde naturel et qu'il a pu lui donner sens et esprit éliminant de facto la possibilité que la nature soit capable d'intelligence par elle-même, la logique et la nature n'étant pas naturellement concomitants.

Prétendre, au contraire des "traditions philosophiques" et du platonisme, que le "logos" est naturel avant d'être culturel, c'est profaner le culte de la culture et le dépouiller de son caractère sacré et aristocratique. Qui édifie son savoir et sa philosophie ? Qui dote la culture d'un esprit social sinon l'être humain ? La nature pensante précède et vitalise sa "théorie de la connaissance" sinon c'est l'obscurantisme assuré. Il n'y a donc aucune opposition originelle entre la nature et la culture sauf si on y introduit le doute métaphysique. La réalité est-elle matérielle ou idéelle ? "L'esprit" est-il naturel ou culturel ? Pourquoi les opposer ? Si j'avais à qualifier de "surnaturaliste" l'une des deux oeuvres suivantes, la grotte de Lascaux ou la chapelle Sixtine, j'opterais pour cette dernière. Pourtant la première précède la seconde de 20,000 ans.

Le naturel est spirituel : il recherche l'entendement. Le "raisonnement" est naturel et faillible. Les gènes humains "sont capables de sentiments, de culture, d'esprit, d'actes et d'idées (bonnes et mauvaises)", aptes pour une vie à la fois matérielle et intelligente selon les équilibres atteints. L'intelligence est donc instinctive malgré "l'apparent caractère bestial et primitif" de notre matériel génétique. L'épopée humaine, parcellisée en apparence, fut globale dans les faits. La connaissance est un patrimoine mondial. L'évolution psychophysiologique d'homo sapiens existait bien avant d'être nommée "création" ou "sélection naturelle" (6). Le "spatio-temporel" et "l'anthropologie" en tant que concepts déclassent maintenant la "métaphysique" et rendent mieux compte du phénomène cosmique et humain.

Notre champ culturel, d'obédience créationniste, est en train d'étouffer les chants de la nature. Les climato-sceptiques sont souvent ceux qui refusent l'idée que l'homme puisse un jour se déloger lui-même de son piédestal en s'incriminant du réchauffement de la planète, perdant ainsi son statut "d'Anthrôpos supérieur" contrôlant la biosphère. Consolons-nous. La planète devrait y survivre.

Si c'est la culture qui donne forme et esprit à la nature, par un effet transcendant, réversif ou régressif du savoir, il ne restera plus qu'à rechercher le lieu d'origine d'une conscience plus grande que nature préexistant à l'humanité et trouver l'auteur procréatif qui a permis l'institution d'une absolue connaissance sur Terre sans implication humaine, ni reflet génétique.

Le choc des cultures ? Plutôt le choc d'une nature humaine en lutte avec la logique globale de sa propre culture. Pourquoi séparer le "spirituel du naturel", l'idéel du matériel, le savoir penser du savoir-faire ? Pourquoi éloigner la philosophie, comme pouvoir d'orientation, du corps social; de la vie économique, sociale, scientifique, politique ? Ne soyons pas utopistes; le pont entre les sciences et la philosophie restera donc "lettre morte". Le monde continuera d'être à la fois matérialiste et "religieux", mystifié par sa propre "intelligence suprême". Par marque d'humilité ou manque d'humilité ?

"La matière s'oriente et s'organise". Les espèces aussi. "Pourvu que nous nous accordions sur la chose, il est inutile que nous discutions sur les mots" (7).


M.G., le 21/02/2016



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Notes :

  1. David Suzuki

  2. "L'univers est" ou "Dieu existe" sont deux "mèmes" issus des mêmes "gènes". Et pourtant!

  3. Le "Dieu des croyants"

  4. Le "Dieu des athées"

  5. "La culture tente de dompter l'animal".

  6. Nous pourrions plutôt parler de sens naturel; lois de l'intégration (émergence) et des intégrités naturelles (préservation, adaptation).

  7. David Hume, Enquête sur l'entendement humain




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